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Article du mois

Publié le 09 jan 2023Lecture 4 min

Efficacité et tolérance des immunoglobulines intraveineuses dans la dermatomyosite : résultat d’un essai contrôlé randomisé de phase III

François CHASSET, Service de dermatologie et allergologie, Hôpital Tenon, Paris

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La dermatomyosite (DM) est l’une des principales myopathies inflammatoires avec la polymyosite. Il s’agit d’une maladie rare touchant principalement les femmes avec deux pics de fréquence : dans l’enfance et après 50 ans. Chez l’adulte, cette maladie peut être associée à des cancers, en particulier en cas de présence de certains sous-types d’auto-Ac : les anticorps anti-TIF-1 gamma. Le traitement de la DM n’est pas codifié et repose principalement sur des avis d’experts. Il repose principalement sur la corticothérapie générale. Les immunosuppresseurs classiques incluant le méthotrexate et mycophénolate mofetil sont classiquement utilisés malgré un faible niveau de preuve. L’hydroxychloroquine est parfois utilisée mais semble moins efficace que dans le lupus cutané. Le rituximab et les anti-JAK sont utilisés dans les formes réfractaires. Les immuno-globulines intraveineuses (IgIV) sont des concentrés d’IgG purifiées à partir de plasma humain. L’efficacité des IgIV dans la DM a été suggérée sur la base d’un essai contrôlé randomisé de 15 patients et d’étude rétrospective. Cette étude rapporte les résultats d’un essai contrôlé randomisé de phase III. Il s’agissait d’une étude prospective, de phase 3, contrôlée randomisée en 2 bras parallèles, réalisée en Europe et aux États-Unis entre février 2017 et novembre 2019. Les patients inclus avaient un diagnostic de DM selon les critères de Bohan et Peter et étaient en échec d’une corticothérapie générale et/ou d’un traitement suppresseur. La DM était active malgré un traitement actuel avec une corticothérapie générale maximale de 20 mg/j et un maximum de 2 immunosuppresseurs parmi hydroxychloroquine, méthotrexate, azathioprine, mycophénolate mofetil... à dose stable depuis au moins 3 mois. Les patients avec un cancer, un état d’hypercoagulabilité ou des antécédents de thrombose étaient exclus. L’étude consistait en une phase contrôlée randomisée ou les patients étaient randomisés 1:1 pour recevoir des IgIV (Octagam, 10 %) à la dose de 2 mg/kg administrés sur 2 jours pendant 5,5 heures toutes les 4 semaines jusqu’à la semaine 12, avec une évaluation à S16 puis une phase ouverte où tous les patients recevaient les IgIV jusqu’à la semaine 40. La dose pouvait être diminuée à 1 mg/kg en cas de contrôle de la maladie à la semaine 28. Le critère de jugement principal était la réponse définie par une amélioration de 20 points du score TIS un score composite allant de 0 à 100 prenant en compte l’atteinte musculaire, le PGA (Physician Global Assessment), les atteintes extracutanées, les dosages biologiques en particulier les CPK et la qualité de vie. Parmi les critères de jugements secondaires étaient également évaluées l’atteinte cutanée par le CDASI (Modified Cutaneous Dermatomyositis Disease Area and Severity Index) et la tolérance. Au total, 126 patients ont été évalués pour éligibilité, et 95 ont été randomisés, 47 dans le groupe IgIV et 48 dans le groupe placébo, majoritairement des femmes, d’âge médian 52 ans, avec une très grande majorité de patientes d’origine caucasienne et ayant dans 100 % des cas une atteinte musculaire et cutanée active. Globalement, 88 % des patients avaient des corticoïdes et 68 % au moins 1 immunosuppresseur. Le critère de jugement principal a été atteint à la semaine 16 chez 79 % dans le groupe IgIV et 44 % dans le groupe placébo (différence absolue de 35 % [IC 95 % : 17-53]). Concernant l’atteinte cutanée, à la semaine 16 on notait une amélioration moyenne du CDASI de 9,4 points (IC 95 % : 6,2-12,5) contre 1,2 (-1-3,3). À la semaine 40 pendant la phase ouverte, on notait une amélioration dans le groupe placébo qui rejoignait la courbe du groupe IgIV à la semaine 40, que ce soit pour le score TIS ou le score CDASI. En ce qui concerne les données de tolérance, il a été retrouvé une augmentation des céphalées (37 %), de la fièvre (19 %) et des nausées (12 %) dans le groupe IgIV. Par ailleurs, 6 évènements thromboemboliques survenant chez 5 patients ont été attribués aux IgIV ayant entraîné une modification du protocole recommandant une diminution de la vitesse maximale de perfusion de 0,12 à 0,04 ml/kg/min. Au total, cette étude confirme l’efficacité des IgIV dans les dermatomyosites résistantes aux corticoïdes et aux immunosuppresseurs. Elle a permis d’obtenir un élargissement du remboursement des IgIV dans la DM dans cette indication (commission transparence du 18 mai 2022), plus seulement aux formes musculaires (en particulier ORL) avec mise en jeu du pronostic vital. En revanche, les IgIV sont associées à des effets indésirables en particulier thromboemboliques qui sont importants à prendre en compte d’autant que les patients avec thromboses antérieures étaient exclus de l’essai.

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