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Dermatite atopique, Eczéma

Publié le 29 mai 2023Lecture 4 min

Dermatites de contact, pensez aux résines époxy

Denise CARO, d’après la communication de Dr Marie-Noëlle Crépy (CFA 2023)

Les dermatites de contact sont l’une des principales causes de maladies professionnelles. La manipulation des résines époxy y occupe une large place d’autant que les systèmes époxy comportent de nombreux allergènes. Fortement sensibilisants et de plus en plus fréquemment utilisés, il faut savoir les rechercher.

Les résines époxy représentent la deuxième cause de dermatites de contact professionnelles en Europe (derrière les additifs du caoutchouc et devant les biocides)(1,2), et même la première en Finlande(3,2). La prévalence élevée des allergies aux époxy tient à leur fort potentiel sensibilisant et à leur utilisation croissante. Les allergènes présents concernent non seulement les résines époxy mais aussi les durcisseurs et les diluants entrant dans la composition des produits. Les métiers de la construction sont en première ligne, mais ceux de l’ingénierie électrique, l’aéronautique, la plasturgie, la production de peintures et d’articles de sport sont également très exposés au risque d’allergie aux systèmes époxy. Entre 2011 et 2020, la prévalence de cette dermatose professionnelle est passée de 8 à 26 % chez les plombiers et tuyauteurs, de 14 à 24 % chez les opérateurs en plasturgie et de 16 à 23 % chez les peintres(2). On a même enregistré des cas d’allergie aux époxy chez des agents chargés de nettoyer des imprimantes 3D. À noter que récemment des dermatites de contact aux époxy ont été observées en dehors du contexte professionnel, chez les personnes (parfois des enfants) qui confectionnaient de petits objets en résine en suivant des tutoriels Internet.   ECZÉMA DES MAINS ET DU VISAGE   La contamination se fait soit par voie aéroportée, soit par voie manuportée. Sont en cause les surfaces contaminées, les éclaboussures et surtout des équipements de protection inadaptés. Au plan clinique, la forme cutanée la plus fréquente est un eczéma des mains et des avant-bras. Une atteinte du visage, notamment au niveau des paupières, est possible ; le responsable est alors le plus souvent un durcisseur (volatil). Une urticaire de contact est beaucoup plus rare. Elle est localisée sur les mains, les bras et le visage. Elle est le fait d’anhydrides d’acide, comme l’anhydride méthylhexahydrophtalique (MHHPA)(4). Dans tous les cas, les signes cliniques régressent avec l’arrêt de l’exposition. Le diagnostic repose sur des signes cliniques évocateurs rythmés par une exposition à un produits suspect et sur des tests. Pour les tests cutanés, on peut faire appel à la batterie standard européenne (BSE) qui contient l’éther diglycidique du bisphénol A (DGEBA) à 1 %, principal allergène des résines époxy. Toutefois la négativité de la BSE n’élimine pas la possibilité d’une réaction à un autre allergène époxy : tel est le cas de 20 % des patients sensibilisés à un diluant et de 60 % de ceux sensibilisés à un durcisseur. Il convient alors de faire appel à une batterie époxy. Parmi les résines époxy non DGEBA, citons le bisphenol-F diglycidyl ether (DGEBF)(5) présent dans la batterie époxy et souvent utilisé avec le DGEBA pour en augmenter la résistance chimique. On observe aussi des allergies aux résines époxy aniline, employées dans des applications militaires et aérospatiales : éther tétraglycy- dil de 4,4’–méthylènedianiline (TGMDA)(6) et des résines époxy cyclo-aliphatique (huiles de coupe et huiles minérales). Pour certains de ces allergènes qui ne sont pas dans la batterie époxy, il n’y a pas d’autre solution que de tester le produit fini en veillant que la concentration de la substance suspecte soit compatible avec celle utilisée dans les tests(7). Pour cela il faut rechercher la composition exacte du produit inscrite sur la fiche de données de sécurité. Les diluants réactifs sont responsables jusqu’à 30 % des allergies aux systèmes époxy. Les principaux allergènes sont le 1,4-butanediol diglycidyl ether (BDDGE), le phenyl glycidyl ether (PGE) et le p-tert-butylphenyl glycidyl ether (PTBPGE)(7). De même, les durcisseurs sont en cause dans près de 26 % des allergies aux systèmes époxy. Les principaux sont le m-Xylylenediamine (MXDA) – qui se trouve dans la batterie époxy –, le 2,4,6-Tris(dimé- thylaminométhyl)phénol (tris-DMP) et l’isophorone diamine (IPDA)(7,8). Enfin de nouveaux durcisseurs sensibilisants émergent, comme le copolymère de benzenamine et formaldéhyde hydrogéné (FBAP), 1,3-benzenedimetha amine, N-(2-phenylethyl) derivatives (1,3-BDMA-D). Les patients sensibilisés à ces substances réagissent au diamino-diphénylméthane (MDA) qui semble être un bon test de dépistage(9). Par ailleurs, le diagnostic d’urticaire aux systèmes époxy repose sur une clinique évocatrice et un dosage des IgE anti-conjugués anhydride d’acide- albumine humaine (plutôt que sur des tests cutanés dont la pertinence clinique est moins bonne)(4,10).   LES RÈGLES DE PRÉVENTION   La prévention de ces allergies cutanées aux systèmes époxy peut être résumée en suivant l’acronyme STOP : Substitution/élimination, mesures Techniques, mesures Organisationnelles et Protection individuelle (gants, lunettes, vêtements). Le salarié devra être changé de poste, et parfois même de lieu de travail en cas d’allergie aéro-portée. Il est possible de se référer à un guide donnant les gants de protection à utiliser en fonction des produits chimiques et de la durée d’exposition*. Une épaisseur suffisante pour protéger efficacement est nécessaire. Les plus fins – gants laminés multicouches d’une épaisseur 0,07 mm – ne sont pas très confortables. Les gants butyles de protection chimique sont plus épais (> 0,3 mm) ; il est utile d’ajouter par-dessus plusieurs gants en vinyle que l’on retirera chaque fois qu’on recevra des éclaboussures. Tous ces gants sont chers et doivent être changés tous les jours. De plus en plus utilisés dans de nombreux secteurs industriels (et certains loisirs), les systèmes époxy, hautement sensibilisants, doivent faire l’objet d’une protection renforcée. Toute réaction allergique exige l’arrêt définitif de l’exposition, pas toujours facile à obtenir sans changer radicalement de poste de travail voire d’entreprise. *Forsberg Quick Selection Guide to Chemical Protective Clothing D’après la communication de Dr Marie-Noëlle Crépy (Paris), 18e Congrès francophone d’allergologie (CFA), 25-28 avril 2023.

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