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Dermatologie pédiatrique

Publié le 05 avr 2023Lecture 5 min

Eczéma de contact : penser aux causes que les parents oublient d’évoquer

Caroline GUIGNOT, Lille

Face à la multiplication des allergies chez les enfants (loisirs, sports, etc.), l’investigation doit être plus que méthodique.

Cliniquement, une éruption palmoplantaire, au niveau péribuccal ou périombilical, au niveau des élastiques des couches ou des vêtements, des atteintes des plis ou du siège chez le nourrisson invitent à suspecter un eczéma de contact. Les eczémas résistants à un traitement bien conduit, les eczémas nummulaires, les érythrodermies et les eczémas du visage (pouvant être liés à un allergène aéroporté) doivent aussi faire évoquer ce diagnostic. L’histoire clinique et personnelle de l’enfant doit être approfondie et l’interrogatoire porter sur les produits utilisés pour l’hygiène, les soins du corps, les activités de loisirs, etc. Le rôle des couches, des lingettes, des produits utilisés doit également être interrogé chez les plus petits lorsque le siège est touché. S’il existe une dermatose initiale d’origine inconnue, il faut évaluer avec les parents s’il s’agit d’une aggravation de dermatose préexistante (stable ou non) : des dermatoses initiales peuvent en effet être compliquées par des manifestations d’eczéma liées aux antiseptiques ou aux corticoïdes avec lesquels elles sont traitées.   BATTERIE STANDARD ET ENQUÊTE POLICIÈRE L’exploration diagnostique repose sur l’utilisation de batteries de tests épicutanés standards, dont les allergènes professionnels sont retirés : à défaut ceux-ci pourraient favoriser la sensibilisation. Les batteries adultes peuvent schématiquement être utilisées à partir de 12 ans. Pour identifier l’haptène, l’enquête, quasi policière, doit permettre de passer en revue la sémiologie, le contexte des manifestations, sans omettre les contacts indirects, les manifestations aéroportées et les photosensibilisations. Tous les produits personnels, y compris les produits d’hygiène (soins de la peau et des cheveux, etc.) et les traitements locaux (émollients, dermocorticoïdes), doivent être testés. Face à une chéilite, il faut penser à tester les baumes à lèvres, les dentifrices, les médicaments topiques utilisés localement. Les produits irritants (savons, shampoings, etc.) doivent toujours être testés après dilution pour éviter les réactions d’irritation. Il faut aussi faire attention aux produits d’origine naturelle qui peuvent contenir des allergènes alimentaires favorisant des réactions cutanées, voire anaphylactiques après sensibilisation. Chez l’enfant, les principaux allergènes sont le nickel (repérable par spot test) et le cobalt, certains antibiotiques topiques (néomycine, bacitracine), les parfums, les conservateurs, les surfactants ainsi que l’aluminium. Des granulomes post-vaccinaux liés à l’hydroxyde d’aluminium peuvent être le signe d’une sensibilisation de contact. Plus le vaccin a été réalisé de manière superficielle, plus le risque de sensibilisation est important. Cependant, une étude suédoise a montré que 75 % des enfants perdent cette sensibilité à 5 ans. Les eczémas nummulaires, qui sont plus fréquents parmi les populations d’origine non européennes, notamment chez le garçon et à mesure de l’avancée en âge, sont notamment liés aux formaldéhyde, baume du Pérou, benzalkonium, méthylisothiazolinone (présent dans le slime), propylène glycol et fragrance-mix I. Outre les eczémas directs, des lésions peuvent indirectement être causées par des allergènes manuportés (chaîne de cou métallique, gommes au bout des crayons ou élastiques pour les cheveux devant un eczéma du visage), aéroportés (isothiazolinones des peintures, des produits parfumés, huiles essentielles), voire liées à un contact avec un tiers exposé à un allergène (eczéma par procuration). Attention également aux plantes contenant des furocoumarines qui peuvent engendrer des problèmes de phytophototoxicité (agrumes, panais, figuier, etc.). Parmi les allergènes contemporains, il faut savoir que des allergies aux métaux (nickel, chrome, cobalt) et aux acrylates peuvent apparaître avec la manipulation de matériel informatique, des téléphones portables et certains écouteurs. Le matériel sportif (combinaison de plongée contenant des thiourées, protège-tibia contenant de l’acétophénone azine…) est constitué de mousses ou de colles qui peuvent conduire à des manifestations locales mais aussi à distance. Ces allergènes peuvent aussi être présents dans des chaussures ou des tongs. Dans ces derniers cas, il faut donc tester les différents composants de la chaussure et les produits de traitement des chaussures. La saisonnalité des manifestations et leur chronologie par rapport à l’été ou à la rentrée scolaire (moments propices aux nouvelles activités) peuvent aider à orienter l’enquête. L’été, l’hyperhidrose peut aussi favoriser la sensibilisation. Si tous les résultats des patch-tests sont négatifs, il faut penser à évaluer l’hypothèse d’une dermite de contact aux protéines, qui correspond à la phase tardive d’une allergie modérée immédiate : son diagnostic repose sur des prick-tests.   ECZÉMA DE CONTACT AU COURS DE LA DERMATITE ATOPIQUE L’altération de la barrière cutanée liée à la dermatite atopique (DA) facilite la pénétration des irritants et des allergènes. Les tests sont utiles dans ce contexte, leur pertinence étant supérieure chez l’enfant à celle observée chez l’adulte. La recherche d’une allergie de contact doit vraiment faire partie de l’exploration d’une DA. Elle repose sur les mêmes principes et les mêmes recherches allergéniques que chez l’enfant non atopique. Néanmoins, ces tests doivent idéalement être menés en dehors des poussées et à distance des traitements (UV, immunosuppresseurs, 2-3 jours après arrêt des corticoïdes locaux, etc.). Ils peuvent toutefois être conduits chez l’enfant atopique traité par dupilumab. Dans ce contexte, on a souvent recours aux traitements locaux chez l’enfant, ce qui invite à évoquer systématiquement leur rôle : dermocorticoïdes, émollients, antiseptiques, etc. Pour exemple, la Biseptine, qui contient trois composés (chlorhexidine, acide benzylique, benzalkonium), est souvent en cause dans des manifestations cutanées de sensibilisation chez l’enfants atopique, manifestations qui peuvent être considérées à tort comme de l’érysipèle. L’interprétation et la lecture des tests sont plus difficiles chez l’enfant atopique, car il peut être délicat de distinguer les réactions allergiques des réactions d’irritation, notamment celles liées aux métaux. Il ne faut donc pas poser trop rapidement le diagnostic d’allergie ni omettre de surveiller les réactions tardives chez ces enfants : il faut recommander aux parents de ne pas effacer les grilles de tests immédiatement, afin de pouvoir qualifier des manifestations qui n’apparaissent parfois qu’après 5 à 7 jours.  

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