Publié le 05 mai 2023Lecture 4 min
Folliculite décalvante, alopécie frontale fibrosante et cellulite disséquante - Des alopécies à différencier
Muriel GEVREY, D’après la communication orale sur les dermatoses inflammatoires (CO12) dans le cadre des JDP 2022
Parmi les dermatoses inflammatoires, certaines alopécies surviennent sur un terrain particulier qui nécessite un bilan et une prise en charge orientée.
LA FOLLICULITE DÉCALVANTE
Les auteurs d’un travail publié dans le British Journal of Dermatology(1) ont cherché un lien entre la folliculite décalvante (FD) et l’épidermolyse bulleuse (EB). Ils ont suspecté un lien physiopathologique, car l’association empirique observée entre FD et EB ne leur semblait pas fortuite et devait reposer sur des caractéristiques physiopathologiques communes. L’hypothèse retenue étant une rupture de la barrière épidermique qui favoriserait l’effraction du microbiote vers la couche sous-épidermique.
Ils ont étudié 30 cas de FD chez 243 patients ayant tous une épidermolyse bulleuse, appartenant à une cohorte de patients vus entre 2010 et 2021 dans deux centres experts spécialisés dans les épidermolyses bulleuses héréditaires.
Dans cette étude, toutes les épidermolyses bulleuses étaient dystrophiques, 70 % touchaient des femmes, et il existait davantage de formes génétiques récessives. La majorité des FD était sans comorbidité associée. Les auteurs ont confirmé l’association pressentie entre FD et EB sous la forme d’une perturbation immunitaire.
Cette association est un nouveau fait significatif pour expliquer les causes de FD, suggérant que cette anormalité d’épidermolyse bulleuse pourrait constituer une altération de la barrière épidermique favorisant ainsi la FD. On voit aussi un effet proportionnel qui renforce le lien physiopathologique : plus l’épidermolyse bulleuse est sévère, plus la FD est sévère. Les auteurs ont aussi constaté une plus grande sévérité de l’alopécie chez les personnes, essentiellement des femmes, ayant une coiffure avec traction.
La topographie de la calvitie renforce le rôle du microbiote chevelu qui fait effraction dans les zones où est présente la forte traction.
L’ALOPÉCIE FRONTALE FIBROSANTE
L’alopécie frontale fibrosante (AFF) est caractérisée par une alopécie cicatricielle en bande touchant la zone antérieure du cuir chevelu. Une alopécie des sourcils est fréquemment concomitante ainsi que des atteintes axillaires, pubiennes, des duvets du visage et de la pilosité corporelle. L’AFF atteint surtout des femmes après la ménopause, et si son incidence augmente continuellement depuis quelques années, la physiopathologie reste inconnue. Son évolution se fait vers une stabilisation spontanée sur plusieurs années. L’AFF est favorisée par le lichen plan, la rosacée, la dysthyroïdie alors qu’elle s’associe plus rarement à un diabète ou à une HTA. Ce type d’alopécie est de découverte récente, jamais décrite avant 1994 ; on suppose un effet environnemental, le rôle de la crème solaire, du dioxyde de titane. Les corticoïdes locaux topiques ou intra-dermiques, et les cyclines et les inhibiteurs de 5 alpha-réductase per os ont une certaine efficacité.
CELLULITE DISSÉQUANTE DU CUIR CHEVELU
Quant à la cellulite disséquante du cuir chevelu, elle se présente sous forme de pustules, chéloïdes et nodules. C’est une folliculite profonde, non infectieuse, qui touche surtout l’adulte jeune de sexe masculin. Le diagnostic se fait sur la présence de nodules suppurés multiples où se développe une alopécie inflammatoire cicatricielle. Sur le plan histologique, l’atteinte inflammatoire dermique est profonde, polymorphe, riche en neutrophiles, parfois granulomateuse plus diffuse. Le traitement s’apparente à celui de la maladie de Verneuil avec l’utilisation de dermocorticoïdes et d’antibiotiques. Elle peut s’inscrire dans une tétrade constituée par la maladie de Verneuil (maladie du follicule pileux), le kyste pilonidal et la conglobata. Une étude sur 26 patients, dont une très grande majorité d’hommes, d’âge moyen 33 ans, montre qu’elle débute à l’âge de 24 ans. Le traitement repose sur des antibiotiques, l’isotrétinoïne, les corticoïdes locaux, l’infliximab ou l’adalimumab. Les patients sont satisfaits des résultats avec l’obtention d’un score de 7,5/10. Le traitement permet une réduction de 56 % du score du Physician Global Assessment (PGA), une régression de 70 % des nodules et une diminution de 58 % de la surface atteinte. Le Dermatology Life Quality Index (DLQI) objective une réduction de la douleur. Les auteurs en déduisent que la prise en charge pourrait s’assimiler à celle de la maladie de Verneuil.
Dans cette pathologie, l’obésité est nettement plus fréquente : « Il y a trois fois et demi plus d’obésité que dans les autres pathologies dermatologiques », souligne le Dr Anne-Cécile Ezanno, chirurgien à Saint-Mandé. Une étude rétrospective conduite entre 2007 et 2021 à l’hôpital Bégin, où se pratique l’exérèse large et la cicatrisation dirigée, montre que le surpoids n’impacte pas la cicatrisation, que la forme axillaire est plus difficile à traiter, que les fumeurs cicatrisent paradoxalement plus vite que les non-fumeurs, mais qu’il existe probablement un biais d’interprétation dans la mesure où les fumeurs ont une forme plus grave justifiant une mise sous traitements plus intensifs, notamment par biothérapie.
Côté biothérapie, une étude monocentrique sur 22 cas montre une relation entre la concentration d’infliximab et l’efficacité jugée sur l’Hidradenitis Suppurativa Clinical Response (HISCR), définie par une réduction d’au moins 50 % par rapport à l’évaluation initiale du nombre total des abcès et des nodules inflammatoires aux semaines 12 et 24, en distinguant les répondeurs des non-répondeurs. Les auteurs de l’étude définissent un seuil de 7 microgrammes/ml d’infliximab qui sépare les répondeurs des non-répondeurs au traitement.
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