Publié le 30 nov 2024Lecture 3 min
Érythème et flushs dans la rosacée - Évaluation d'une biothérapie, l’érénumab
François CHASSET, service de dermatologie et allergologie, hôpital Tenon, Paris
La rosacée est une dermatose faciale qui impacte la qualité de vie des patients, notamment en raison de la survenue de flushs et d’un érythème. Une étude danoise a évalué l’intérêt de l’inhibition du récepteur de la calcitonin gene-related peptide (CGRP) par une biothérapie, l’érénumab. Au vu des résultats cliniques, il semble que l’inhibition du récepteur CGRP présente un potentiel dans le traitement des atteintes vasculaires de la rosacée.
La rosacée est une dermatose inflammatoire chronique fréquente puis qu’elle touche jusqu’à 5,5 % de la population mondiale. C’est une dermatose principalement faciale, associant des éléments inflammatoires (papulo-pustules), une couperose, des flushs, un possible rhinophyma et/ou une atteinte oculaire. Les traitements sont multiples et reposent principalement sur le métronidazole topique, l’ivermectine topique, les cyclines et l’isotrétinoïne à faible dose. Ces traitements sont classiquement efficaces sur les lésions vasculaires mais moins sur l’érythème persistant ou sur les flushs qui sont parfois accessibles au laser vasculaire et plus récemment à la paroxétine. Parmi les molécules impliquées dans la physiopathologie, la calcitonin gene-related peptide (CGRP) est élevée dans le plasma des patients avec une rosacée ainsi que chez ceux ayant une migraine. Récemment, des anticorps (Ac) monoclonaux ciblant la CGRP ont obtenu l’AMM dans le traitement de la migraine.
Dans leur article, Wienholtz et coll. ont évalué l’efficacité et la tolérance d’un Ac monoclonal ciblant le récepteur du CGRP sur l’érythème persistant et le flush de la rosacée. Il s’agissait d’une étude ouverte, non randomisée, prospective, réalisée dans plusieurs centres au Danemark. Les patients éligibles étaient des adultes atteints de rosacée présentant dans les 4 semaines avant le début du traitement au moins 15 jours d’érythème modéré à sévère et/ou de flushs modérés à extrêmes. Tous les traitements topiques ou oraux de la rosacée devaient avoir été arrêtés depuis 1 mois ou 5 demi-vies. Les patients avec antécédents de maladie cardio-vasculaire étaient exclus. Après une période d’observation de 4 semaines, les patients recevaient 140 mg d’érénumab par voie sous-cutanée toutes les 4 semaines pendant 12 semaines. Une visite de suivi pour la tolérance était réalisée à la semaine 20. Le critère de jugement principal était la variation moyenne du nombre de jours avec un flush modéré à extrême pendant les semaines 9 à 12, comparativement à la période d’observation initiale de 4 semaines. La variation moyenne du nombre de jours avec un érythème modéré à sévère était un critère secondaire, ainsi que la qualité de vie et la tolérance.
Au total, 30 patients (âge moyen [SD], 38,8 [13,1] ans), majoritairement des femmes (n = 23 femmes [77 %]), ont été inclus. Vingt-sept de ces patients ont terminé l’étude de 12 semaines. Parmi eux, 87 % avaient déjà reçu un traitement local ou systémique pour la rosacée et 43 % au moins trois traitements. En ce qui concerne le critère de jugement principal, le nombre moyen de jours avec flushs modérés à extrêmes, qui était de 23,6 jours (écart type 5,8) au début de l’étude, était réduit de 6,9 jours (IC à 95 %, –10,4 à –3,4 jours ; P < 0,001), et 26 % des patients ont eu une réduction de plus de 50 % du nombre de jours avec flush. De façon similaire, le nombre moyen de jours avec un érythème modéré à sévère, qui était de 15,2 jours (9,1) au début de l’étude, a été réduit de 8,1 jours (IC à 95 %, –12,5 à –3,7 jours ; P < 0,001). Il existait une amélioration significative de la qualité de vie évaluée par le DLQI et le RosaQoL, un score de la qualité de vie de la rosacée, mais pas d’amélioration des scores d’anxiété et de dépression. Les événements indésirables comprenaient une constipation transitoire légère à modérée (10 patients [33 %]), une aggravation transitoire des rougeurs (4 patients [13 %]), des ballonnements (3 patients [10 %]) et des infections des voies respiratoires supérieures (3 patients [10 %]), ce qui était attendu par rapport aux données sur la migraine.
Flushs dans la rosacée chez une patiente jeune.
En conclusion, ces résultats suggèrent que l’érénumab pourrait être efficace dans la réduction des flushs et de l’érythème associés à la rosacée avec un profil de tolérance acceptable. L’inhibition du récepteur CGRP présente un potentiel dans le traitement des atteintes vasculaires de la rosacée, qui est une composante manquant aujourd’hui cruellement de traitement efficace. À noter que ce médicament n’a pas obtenu d’ASMR suffisante en France dans la migraine pour un remboursement malgré un SMR important.
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