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Dermatologie générale

Publié le 30 nov 2014Lecture 7 min

Les complications cutanées péristomiales

M.-C. LIGIER, Stomathérapeute, CHU Jean-Minjoz, Besançon
L’existence et le travail des infirmiers(ères) stomathérapeutes sont souvent mal connus par le milieu médical, paramédical et la population. Cette spécialité requiert une maîtrise des connaissances théoriques et un travail d’éducation thérapeutique afin de permettre au patient stomisé de retrouver son autonomie après l’intervention et de reprendre une vie personnelle, familiale, sociale et professionnelle aussi normale que possible.
  Histoire des stomies « Stomie » est le terme qui définit l’abouchement intentionnel d’un organe creux à la peau dans le but d’assurer l’évacuation de matières physiologiques. La stomathérapie a été créée aux États-Unis au début des années 1960 à l’initiative du professeur Rupert Turnbull, chirurgien au sein de la Cleveland Clinic (Cleveland, Ohio) et de Norma N. Gill, elle-même iléostomisée. En France, en 1976, le Pr Guillemin, chirurgien à l’Hôtel-Dieu de Lyon, souhaite la collaboration d’une infirmière stomathérapeute au sein du service de chirurgie digestive et l’ouverture d’une école de stomathérapie. La première consultation dédiée a été créée par Suzanne Montandon, première stomathérapeute française diplômée de la Cleveland Clinic. Aujourd’hui, on compte en France 650 stomathérapeutes parmi lesquelles 442 bénéficient d’un détachement pour cet exercice spécifique. Parmi elles, 252 exercent moins de 1 jour par semaine, 62 sont à mi-temps et 53 à temps complet. En France, plus de 100 000 personnes sont porteuses d’une stomie définitive(1).   Les différents types de stomies Il existe différentes sortes de stomies en chirurgie digestive : – les œsophagostomies qui sont souvent des stomies d’exclusion pour des plaies œsophagiennes ; – les gastrostomies qui sont créées très souvent pour permettre une alimentation entérale ; – les jéjunostomies qui sont destinées à l’alimentation ou l’évacuation ; – les iléostomies se situant sur la partie terminale de l’intestin grêle; – pour finir, sur les parties mobiles du gros intestin, on répertorie quatre types de stomies : la cœcostomie souvent utilisée pour les irrigations, la colostomie transverse droite et gauche et la colostomie gauche ou sigmoïdienne.   Produits de stomathérapie En 1963, le Dr James Chen dépose une demande de brevet pour les adhésifs hydrocolloïdes. En stomathérapie, il s’agit de notre produit de référence et il peut être utilisé sous différentes formes pour la protection de la peau ou pour le maintien des poches : de la pâte (qui contient de l’alcool) qui joue un rôle de joint et de protecteur cutané, des barrettes qui peuvent être modelées et utilisées dans les plis, des anneaux plats ou convexes qui seront mis autour de la stomie en intégralité ou partiellement et de la poudre qui sera mise avec parcimonie sur les brûlures humides. Pour finir, on peut également utiliser une ceinture qui permettra une meilleure adaptation de l’appareillage sur l’abdomen et augmentera la sécurité du patient (figure 1).     Les complications précoces   Désinsertion Les causes sont diverses. Il peut s’agir de lâchage de sutures, de trouble vasculaire, de sepsis ou d’une fragilité des tissus due à un traitement par chimiothérapie. Pour traiter ce type de complication, il faut nettoyer la désunion au sérum physiologique, appliquer un alginate dans l’orifice et recouvrir de pâte hydrocolloïde. Il est ensuite nécessaire de mettre en place un appareillage deux pièces, souple, avec une découpe précise au diamètre de la stomie. Pour finir, recouvrir la désunion avec le support. Attention : les selles ne doivent pas passer dans l’orifice, pour permettre la cicatrisation. Ne pas oublier de surveiller la couleur, la chaleur et la douleur de la peau péristomiale pour déceler une éventuelle cellulite (figure 2).     Les complications tardives   Sténose Elle peut être due à un orifice cutané ou musculo-aponévrotique trop serré, une prise pondérale importante ou être une conséquence de complications précoces telles que nécrose, désunion, désinsertion ou abcès. Un toucher stomial est nécessaire pour établir le diagnostic. Une fois celui-ci confirmé, traiter l’irritation suintante avec de la poudre hydrocolloïde, protéger la peau au pourtour de la stomie avec un anneau et coller une poche, une pièce souple qui s’adaptera parfaitement aux plis de l’abdomen. Il faut parfois avoir recours à des dilatations répétées qui seront faites au doigt (figure 3).     Varices péristomiales ou tête de méduse Causées par l’hypertension portale, elles se caractérisent par une peau péristomiale très fragile et des saignements qui peuvent être importants et très angoissants pour le patient. Pour les traiter, nettoyer avec des gestes très précautionneux en tamponnant la peau. Placer ensuite un alginate hémostatique autour de la stomie pour diminuer les saignements. Pour finir, on applique un appareillage, une pièce souple vidable et que l’on changera le moins possible pour éviter tout traumatisme. Le soin aura pour but de prévenir la douleur et respecter la peau péristomiale et on évitera des changements d’appareillage excessifs (figure 4).     Prolapsus Les causes du prolapsus sont diverses : un orifice cutané trop large, une prise de poids récente et rapide, un effort intense, une ceinture de stomathérapie trop serrée (mettre une ceinture n’est pas un geste anodin) ou encore un appareillage convexe inadapté. Pour traiter ce genre de lésion, commencer par mettre en place un appareillage d’une ou deux pièces, sans appui ni convexité, et sans ceinture. On pratiquera par ailleurs une découpe plus large que la stomie pour ne pas léser la muqueuse quand le prolapsus sortira. Pour finir, mettre de la pâte hydrocolloïde autour de la stomie pour protéger la peau des effluents. Chaque fois que cela est possible, on apprendra au patient, ou à l’infirmier libéral, à réduire le prolapsus. Toutefois, une reprise chirurgicale pourra s’avérer nécessaire (figure 5).     Les problèmes cutanés   Dermite due aux effluents Cette complication provient toujours de fuites, le plus souvent, d’iléostomie. Celles-ci peuvent avoir des causes diverses telles que : une mauvaise position de la stomie, une stomie plane, une mauvaise technique de soins, un appareillage inadapté ou une modification de l’abdomen par une prise ou une perte de poids significative. Le traitement de cette dermite consiste à installer le patient en position successivement allongée et assise afin de visualiser les plis et les creux et de pouvoir adapter l’appareillage en conséquence (figure 6). Lorsque l’on a affaire à des lésions suintantes, il faut utiliser de la poudre d’hydrocolloïde, adapter un matériel deux pièces convexe (pour pouvoir laisser le support plusieurs jours en place) avec une ceinture pour maintenir la poche. En fonction du degré de brûlure, maintenir une position allongée durant 24 heures sera peut-être nécessaire pour éviter toutes fuites. À noter : une brûlure d’iléostomie est une urgence en stomathérapie.   Dermite de contact Ce type de dermite est dû à un adhésif, des produits irritants ou allergisants. Face à ce type de complication, il est nécessaire de protéger la peau au-delà du support hydrocolloïde, car il existe une réaction entre le molleton de la poche et la transpiration sur la peau du patient. On va calmer la douleur et assécher l’irritation en utilisant un spray à base d’avoine et d’oxyde de zinc. On peut également conseiller au patient d’intercaler pendant quelques jours un tissu en coton entre sa peau et sa poche (figure 7).   Pyoderma gangrenosum Cette complication atteint des surfaces variables et peut être située dans la zone péristomiale. La cause est souvent une récidive de la maladie de Crohn ou de la rectocolite ulcérohémorragique. Il est nécessaire de procéder à une biopsie diagnostique qui déterminera une prise en charge médicale spécialisée auprès d’un dermatologue et d’un gastroentérologue. Avec ce type de lésion, la stomathérapeute doit souvent avoir recours à « la débrouille et la persévérance ». En effet, en ce qui concerne l’appareillage, chaque cas est particulier. Il faudra réussir à s’adapter à la complication et à fixer la poche de manière à éviter tout contact des selles avec les lésions et le traitement cutané qui a été mis en place (figure 8).

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