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Infectiologie

Publié le 28 déc 2009Lecture 4 min

Candidose systémique chez une diabétique immunodéprimée

S. AOUFI*, A. AGOUMI*, Y. AFIFI** CHU Ibn Sina, Rabat, Maroc, *Laboratoire de parasitologie et de mycologie médicale **Service de dermatologie

Les candidoses systémiques se situent actuellement au 4e rang des infections hospitalières ; leur fréquence ne cesse pas de croître(1). Malgré les progrès réalisés en matière de prise en charge, la mortalité reste élevée. Le retard du diagnostic complique davantage la situation, et l’hémoculture, examen clé, n’est sensible qu’à 50 % (2,3).

Observation Madame D.A., 60 ans, diabétique mal équilibrée et traitée pour lymphome malin non hodgkinien par chimiothérapie depuis 2002. Elle a consulté en dermatologie pour des lésions érythémato-squameuses des plis inguinaux et axillaires, et de multiples nodules purulents fistulisés siégeant au niveau des racines des membres et du tronc (figures 1). De multiples prélèvements ont été réalisés ; ils ont intéressé aussi bien le pus des nodules et les squames à différentes localisations. L’examen direct de tous les produits pathologiques recueillis a révélé la présence de nombreuses levures bourgeonnantes et de pseudofilaments (figure 2), avec isolement et identification du Candida albicans à la culture sur différents milieux de Sabouraud. Consécutivement à ces résultats et vu l’état immunodéprimé de la patiente, il a été jugé utile de faire un examen mycologique des urines. Celle-ci a révélé une candidurie à Candida albicans. Une hémoculture a aussi été réalisée à la recherche d’une candidémie, mais elle est restée négative. Figures 1. Lésions érythémato-squameuses nodulaires. Il est à noter que l’examen anatomopathologique des biopsies cutanées des nodules a conclu à la présence de levures à la coloration PAS (acide périodique de Schiff). La patiente est décédée avant tout traitement antifongique. Commentaire Le diagnostic de candidose systémique a été retenu sur la survenue de manifestations cutanées secondaires typiques : nodules cutanés à la racine des membres chez une patiente ayant plusieurs facteurs de risque avec présence de levures à l’examen histologique de ces nodules et isolement de Candida albicans au niveau de ces lésions et dans les urines. Candida albicans commensal du tube digestif (réservoir principal) peut disséminer par voie hématogène suite à la rupture des barrières muqueuses. Cette origine digestive n’est pas exclusive, en effet la sphère génito-urinaire peut constituer un point de départ des candidoses systémiques. Celles-ci sont nettement favorisées par plusieurs facteurs, dont l’immunodépression (2-4). La symptomatologie très polymorphe et non spécifique rend le diagnostic clinique difficile. L’hémoculture, examen clé le plus disponible, n’est que moyennement sensible (4). Les candidoses systémiques échapperaient alors souvent à la détection, mettant en péril la vie du patient. En revanche, d’autres données peuvent largement contribuer à conclure à ce diagnostic. En effet, une candidose systémique se réfère à une situation où une levure a été identifiée dans plusieurs sites non contigus et impliquant une dissémination hématogène bien que les hémocultures soient restées négatives (2). Figure 2. Examen direct. Présence de levures bourgeonnantes et de pseudofilaments. La localisation cutanée secondaire de forme pathognomonique (maculo-papules ou nodules localisés à la racine des membres et sur le tronc) se voit dans 13 % des cas (6). L’examen mycologique positif de ces lésions confirme le diagnostic. L’observation décrite ci-dessus et qui a rapporté le cas d’une patiente cumulant de sérieux facteurs de risque (diabète déséquilibré, immunodépression par chimiothérapie anticancéreuse) semble être un bon exemple de difficulté diagnostique d’une candidose systémique et de l’apport considérable d’une symptomatologie cutanée typique. Cette observation met en évidence la part importante de l’examen mycologique. Ainsi, la candidose urinaire mise en évidence chez la patiente devrait être un signe d’alarme de candidose systémique chez des patients à risque (1,4,6). Conclusion Le diagnostic de certitude d’une candidose systémique reste difficile, les moyens actuellement disponibles sont souvent décevants. Il serait alors judicieux d’intégrer dans une approche rationnelle toutes les données — épidémiologiques, cliniques, biologiques— pour remédier à ces difficultés diagnostiques. Des manifestations cutanées caractéristiques, quand elles sont présentes, sont à l’heure actuelle presque sans égal en importance pour la résolution du problème.

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