Publié le 02 sep 2008Lecture 5 min
La gale chez le sujet âgé : un diagnostic souvent difficile
A. CHALAL, Centre les Feuillades, Aix-en-Provence
La gale peut être responsable d’épidémies en institution, le sarcopte et ses oeufs pouvant résister dans le temps si les conditions et l’environnement lui sont favorables. Le diagnostic est souvent difficile et tardif, ce qui peut engendrer des épidémies en particulier, si le cas index appartient à la forme assez contagieuse de la gale dite norvégienne. Ces épidémies sont parfois longues et difficiles à maîtriser.
Ectoparasitose due à un acarien invisible à l’oeil nu, la gale est une maladie contagieuse contractée à 95 % par contact peau contre peau et à 5 % par le linge, les sièges et les toilettes. Les personnes âgées vivant en collectivité et dont l’état immunitaire est déjà précaire représentent une cible privilégiée de la gale. Les déments déambulants sont particulièrement touchés du fait de l’impossibilité d’obtenir un isolement. Quant au personnel, il prodigue fréquemment des soins où le toucher est nécessaire. Trois types de présentation Présentation typique L’incubation est souvent asymptotique et dure une douzaine de jours. À la phase d’état apparaît une éruption cutanée faite de sillons scabieux, qui traduisent le trajet de l’acarien dans la couche cornée. On les trouve dans les espaces interdigitaux, les poignets, les chevilles, les aisselles et les zones sexuelles. Le dos et la face sont épargnés. Le prurit est constant à prédominance nocturne entraînant des lésions de grattage. Il est aggravé par les bains chauds, la tiédeur du lit et le déshabillage. Après 3 mois, l’irritation est continue et insupportable la nuit. Il n’y a pas d’évolution favorable en l’absence de traitement. De façon plus spécifique, peuvent exister : chez l’homme, un chancre scabieux génital au niveau de la verge, du gland et des bourses ; chez la femme, un prurit bilatéral du mamelon, associé à des lésions papuleuses ou croûteuses. Gale profuse Elle se déclare sur un terrain immunodéprimé après une corticothérapie excessive ou une dénutrition sévère. Elle se caractérise par des lésions très étendues, disséminées sur le tronc, les membres et le dos, prurigineuses et riches en parasites. Les sillons sont difficiles à voir, car ils sont perdus dans les différentes lésions (vésicules, papules). Gale norvégienne Apanage du sujet âgé grabataire, cachectique, des immunodéprimés sévères ou lors de maladies neurologiques avec troubles sensitifs, il s’agit d’une gale érythro-squameuse donnant des lésions hyperkératosiques touchant le cuir chevelu, les mains, le torse, l’abdomen, les membres supérieurs et inférieurs. Le prurit manque en général, le non-grattage entraînant une pullulation d’autant plus grave. La gale norvégienne peut simuler diverses dermatoses squameuses, telles que le psoriasis ou la dermite séborrhéique. Cette forme est éminemment contaminante, responsable d’épidémie au sein des collectivités. Diagnostic Devant tout prurit, il faut systématiquement évoquer la possibilité d’une gale a fortiori en cas de notion de contact avec des personnes suspectes. La mise en évidence de l’acarien nécessite un prélèvement par aiguille ou vaccinostyle. Pour autant, il ne faut pas céder à la « psychose » de la gale et faire l’analyse diagnostique du prurit (encadré). QUELQUES AUTRES CAUSES DE PRURIT Prurits métaboliques : cholestase… Eczéma (mais gales eczématisées !) Psoriasis Lymphomes cutanés Pemphigoïde bulleuse Prurit sénile Traitement La voie locale classique La gale est une pathologie parfaitement curable à condition : d’obtenir la bonne coopération du patient et du personnel soignant ; de traiter le porteur et son environnement, en règle générale dans le même temps thérapeutique. De façon habituelle, après 24 heures de traitement, un patient traité peut être considéré comme non contagieux. Quant à la répétition des phases de traitement, elles peuvent être envisagées essentiellement lors d’une épidémie. Les deux formes caricaturales nécessiteront de réaliser deux traitements à 8 jours d’intervalle et surtout un suivi dermatologique prolongé (1 à 2 mois). Les produits par voie locale Spécialités Application Effets secondaires Précaution d'emploi Ascabiol® (benzoate de benzyl) Appliquer au pinceau et laisser en contact 24 heures - Sensation de brûlure - Eczéma possible Ne pas toucher les yeux, les muqueuses Scabecid elenol® (lindane) Laisser en contact pendant 12 heures Eczéma possible Ne pas toucher les yeux, les muqueuses Spregal® (pyréthrinoïde de synthèse) Pulvériser sur tout le corps, laver après 12 heures Sensation de brûlure Port de masque par le patient et le soignant pendant la pulvérisation Quand utiliser la voie générale ? Le traitement par voie orale trouve sa place dans les institutions où les épidémies de gale sont fréquentes et difficiles à traiter en raison des difficultés à réaliser un traitement local classique chez toutes les personnes en même temps. Il repose sur l’ivermectine (stromectol®) qui se donne par voie orale à raison d’une seule prise à 200 ug/kg. Le patient doit rester à jeun de 2 heures avant la prise du médicament jusqu’à 2 heures après la prise. Le jour de la prise de stromectol®, le patient doit prendre une douche, se laver avec un savon doux et mettre du linge propre. La literie est changée. L’isolement est décrété. Le lendemain, les soins de nursing normaux sont effectués. L’isolement est levé le surlendemain et on continue de veiller à des soins d’hygiène corrects et de surveiller l’évolution des lésions. Le 8e jour, si nécessaire, un second traitement est effectué, associé éventuellement avec un traitement topique (dont la contre-indication est l’hypersensibilité à l’un des composants). Et en cas d’épidémie ? La maîtrise d’une épidémie nécessite un travail en concertation avec les équipes, une coordination efficace, une planification rigoureuse des opérations, une information claire auprès de l’ensemble du personnel. Par ailleurs, un comité de pilotage s’impose comprenant un certain nombre d’acteurs clés : président du CLIN (Centre de coordination de lutte contre les infections nosocomiales), responsable du service d’hygiène, chef de service, directeur des soins, cadre, soignant, responsable des services techniques, pharmacien, médecin du travail, représentant de la DDASS, voire dermatologue.
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