Congrès
Publié le 17 fév 2016Lecture 5 min
Mélanome métastatique BRAF muté : les avancées thérapeutiques
Depuis 5 ans environ, la prise en charge des mélanomes métastatiques BRAF mutés a connu des avancées majeures grâce à la mise au point de thérapies ciblées (BRAF inhibiteurs et MEK inhibiteurs) et de checkpoint inhibiteurs (anti-CTLA-4 et anti-PD-1, utilisés dans les mélanomes BRAF mutés ou non), avancées qui se traduisent par une augmentation des taux de réponses et un allongement de la survie. Aujourd’hui, nous assistons à un changement de paradigme, le mélanome traité devient pour certains patients une maladie chronique, ce qui implique pour les soignants de s’intéresser davantage à la qualité de vie des patients, à la gestion des effets secondaires, et un changement de la relation soigné/soignant.
De nouvelles questions émergent pour savoir quand utiliser ces nouveaux traitements, quelle est la place des associations et des traitements séquentiels. La dimension médico-économique doit aussi être prise en compte.
À la recherche des biomarqueurs Le pourcentage de patients porteurs d’un mélanome métastatique en vie à 1 an est de 45 % après traitement par un anti-CTLA-4, de 60 % avec un BRAF inhibiteur et de plus de 70 % avec l’association BRAF + MEK inhibiteurs. Pour mieux cibler ces thérapeutiques, il faudrait pouvoir disposer de marqueurs prédictifs de la réponse aux traitements. Le statut BRAF est un facteur prédictif de la réponse au traitement BRAF inhibiteur ± MEK inhibiteur. La mutation de BRAF est considérée comme une mutation driver, mais d’autres mutations sont nécessaires pour aboutir au statut de mélanome muté, si bien que ce statut ne peut être considéré comme un facteur pronostique. L’expression de la protéine mutée est plus souvent retrouvée chez les patients avancés dans la maladie. La corrélation entre le statut BRAF muté et la survie n’est pas certaine. En revanche, le pronostic des patients avec une mutation NRAS est plus péjoratif, avec davantage de métastases cérébrales. Le taux de LDH est considéré comme le reflet de la masse tumorale et probablement lié au métabolisme tumoral. Dans tous les essais, les patients, dont les taux de LDH étaient normaux, ont davantage bénéficié du traitement. La détermination de l’ADN tumoral circulant pourrait fournir un marqueur plus fiable que les LDH. Plusieurs essais ont, en effet, montré que les taux de réponses au traitement sont plus élevés en l’absence d’ADN circulant, de même que la survie sans progression et la survie globale. La réponse complète au traitement pourrait être un élément prédictif, mais le recul est encore insuffisant. Le ligand PD-L-1 a surtout été recherché dans les essais évaluant les immunothérapies anti-PD1 ; chez les patients PD-L-1+, un taux de réponses de 47 % a été mis en évidence. En pratique, les seuils de positivité sont variables selon les études, le marquage est très hétérogène au sein de la tumeur et la molécule peut être exprimée indépendamment des lymphocytes autour de la tumeur. Le nombre de mutations somatiques dans la tumeur augmenterait les chances de réponse au traitement. La décision thérapeutique reste aujourd’hui fondée sur l’état général du patient, son statut mutationnel BRAF, la cinétique de progression tumorale, le taux de LDH, l’existence de métastases cérébrales et la qualité de vie. Par conséquent, le besoin de marqueurs plus précis devient d’autant plus criant que les possibilités thérapeutiques augmentent. Place des thérapies ciblées en 1re ligne dans les mélanomes BRAF mutés Deux combinaisons anti-BRAF + anti-MEK ciblant la voie des MAP kinases ont été évaluées : dabrafénib + tramétinib (essais COMBI-d et COMBI-v chez 423 et 704 patients respectivement) et vémurafénib + cobimétinib (essai COBRIM chez 495 patients). COMBI-d et COBRIM ont été réalisés en double aveugle versus monothérapie anti-BRAF, alors que COMBI-v est un essai ouvert avec possibilité de crossover. Les deux combinaisons ont montré leur supériorité sur la monothérapie en termes de survie, avec un gain d’environ 30 %, soit une médiane de survie de 22,3 mois pour vému/cobri dans COBRIM et 25,3 et 25,6 mois pour dabra/tramé dans COMBI-d et COMBI-v (comparativement à 11 mois en monothérapie avec le vémurafénib dans l’essai BRIM-3). Les taux de survie à 1 an-2 ans sont de 75 et 50 % environ, avec des taux de réponses complètes supérieurs à 10 % (10, 16 et 13 %, respectivement dans COBRIM, COMBI-d et COMBI-v). La médiane de survie diminue chez les patients ayant des taux de LDH élevés. Une analyse poolée regroupant 617 patients permet d’évaluer le pronostic à 3 ans : – LDH normales : taux de survie de 57 % ; LDH élevées, de 7 % ; – LDH normales et 3 sites métastatiques : taux de survie de 38 % ; et < 3 sites métastatiques : taux de survie de 70 %. La toxicité diffère selon les combinaisons : dans l’essai COBRIM, on note 65 % de toxicités de grade 3-4 et 13 % d’arrêts définitifs ; dans les essais COMBI, ces taux sont respectivement de 30-40 % et 11-12 %. D’autres traitements immunothérapiques ont été évalués dans les mélanomes métastatiques BRAF mutés ou non : un anti-CTLA-4 et deux anti-PD1. Il ne semble pas que les résultats diffèrent chez les patients BRAF mutés ou non traités en 1re ou en 2e ligne après échappement. D’où la question de proposer un switch entre thérapie ciblée et immunothérapie, mais à quel moment : avant progression ou à progression ? La décision pourrait être facilitée par des outils tels que l’ADN circulant. L’essai COMBI-T a été conçu pour répondre à cette problématique, en comparant plusieurs modalités de switch entre thérapie ciblée combinée et immunothérapie combinée avant progression et à progression. Quelle immunothérapie en 2e ligne ? Le choix de l’immunothérapie en 2e ligne devrait plutôt se porter sur un anti-PD1 qui a un effet immédiat sur la masse tumorale et donne un taux de réponses proche de celui des BRAF inhibiteurs. La réponse est durable, et les effets secondaires très différents de ceux des thérapies ciblées, de gravité moindre que ceux de l’ipilimumab (anti-CTLA-4). Le statut BRAF ne semble pas avoir d’impact sur le résultat de l’immunothérapie. Les combinaisons d’immunothérapie donnent un taux de réponses de 60 % environ, avec des toxicités sérieuses dans plus de la moitié des cas. L’immunothérapie peut aussi être combinée aux thérapies ciblées. Ces dernières sensibilisent le système immunitaire mais ont aussi pour effet de provoquer une dédifférenciation des cellules, lesquelles risquent de ne plus être reconnues par le système immunitaire. Ces nouvelles combinaisons thérapeutiques sont évaluées dans le cadre de nombreux essais thérapeutiques. M. D. D’après M.-T. Leccia, C. Robert, C. Lebbe et J.-J. Grob, lors du symposium Novartis « Mélanome métastatique BRAF muté et voie MAP kinase : sommes-nous sur la bonne voie ? »
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