Congrès
Publié le 13 fév 2017Lecture 5 min
Psoriasis : une nouvelle maladie ?
La stratégie de prise en charge du psoriasis, telle qu’elle est encore pratiquée aujourd’hui, peut être qualifiée d’ascendante : aux traitements locaux succèdent la photothérapie seule ou associée, puis les traitements systémiques, méthotrexate, ciclosporine pour aboutir aux biothérapies. Et il s’écoule souvent plusieurs années entre chaque étape. Cette latence prolongée, souvent motivée par la peur des effets indésirables, retarde la mise en œuvre des traitements systémiques chez les patients souffrant de psoriasis modéré à sévère. Pourtant, l’arsenal thérapeutique s’est élargi et offre des solutions efficaces et bien tolérées.
Traitement systémique précoce : quel intérêt potentiel ?
Ces dernières années, a émergé le concept de « marche psoriasique », les lésions précoces évoluant vers un psoriasis sévère associé à une inflammation systémique, un rhumatisme psoriasique et des comorbidités plus ou moins sévères (y compris dépression, addictions). Un autre concept récemment développé est celui de « handicap cumulatif », physique et psychologique associé au psoriasis, les comorbidités augmentant si la prise en charge est retardée. Dans cette optique, un traitement précoce serait susceptible de modifier le cours évolutif de la maladie et ses complications. Ce concept est étayé par le caractère inflammatoire de la maladie psoriasique, laquelle exerce un impact majeur sur la vie des patients ; en outre, nous disposons aujourd’hui de traitements permettant de faire blanchir totalement les lésions cutanées chez 30 à 40 % des patients. Peut-on dès lors imaginer des rémissions de la maladie grâce à un traitement précoce, sans traitement de maintien ? Avant de franchir ce cap, il faut néanmoins prendre en compte le bénéfice/risque et le coût des traitements ainsi que le principe de précaution qui veut que le psoriasis ne diminue pas l’espérance de vie, hormis les formes très sévères, ce qui justifie d’économiser les options thérapeutiques. Le traitement précoce a sa place dans les maladies chroniques associées à un dommage tissulaire, telles la polyarthrite rhumatoïde ou la maladie de Crohn. Dans le cadre du psoriasis, il manque une étude qui évalue un traitement précoce permettant d’amener le malade en rémission.
Nouvel arsenal thérapeutique en 2016
L’offre thérapeutique s’est élargie dans le cadre des traitements systémiques du psoriasis. En plus du méthotrexate, de l’acitrétine, de la ciclosporine, sont arrivés les anti-TNF alpha, suivis peu de temps après par les anti-IL12- IL23. En 2016, deux types de thérapies sont apparus : l’apremilast (per os) et deux anticorps monoclonaux anti-IL17 (SC). L’apremilast est un anti-PDE4, enzyme intracellulaire qui joue un rôle important dans le déclenchement des phénomènes inflammatoires en favorisant la transformation de l’AMPc en AMP, lui-même à l’origine de l’activation de certains gènes de cytokines impliquées dans l’inflammation (TNF alpha, IL23). Dans les essais cliniques, un tiers de patients traités par apremilast atteignent un PASI 75 et plus de 20 % sont blanchis. Les effets indésirables les plus fréquents sont des diarrhées et nausées surtout en début de traitement, des infections des voies aériennes respiratoires, de même qu’une perte de poids. Il n’a pas été signalé d’effets cardiovasculaires, de risque de cancer ou d’infection grave. Il n’est pas nécessaire d’effectuer un bilan biologique préalable ou en cours de traitement. En revanche, un signalement a été fait sur le risque d’idées suicidaires et de dépression. L’apremilast est indiqué dans le traitement du psoriasis en plaques chronique, modéré à sévère chez l’adulte en cas d’échec ou d’intolérance des autres traitements systémiques, ainsi que dans le rhumatisme psoriasique. Le sécukinumab et l’ixékizumab ciblent l’IL17, reconnue pour avoir un rôle majeur dans la pathogénie du psoriasis et dans la défense antibactérienne et antifongique. La première thérapie ciblant l’IL17 était le brodalumab, un antirécepteur de toutes les IL17 et dont le développement a été interrompu mais récemment repris. Les deux autres anti-IL17 ont une affinité spécifique pour l’IL17A. Le sécukinumab a obtenu son AMM et son rembourse ment sur la base de plusieurs études pivot concernant près de 4 500 patients.
Comparativement à l’ustékinumab, le sécukinumab obtient des résultats supérieurs : 79 % de réponse PASI 90 à S16 vs 57,6 % (p < 0,0001) et 44,3 % de réponse PASI 100 vs 28,4 % (p < 0,0001) à S16. En outre, la réponse thérapeutique est rapide : 50 % de PASI 75 vs 20 % à S4. Un score PASI 90 ou 100 obtenu à S16 se maintient chez la quasi-totalité des patients à S52. Ces effets s’accompagnent d’une amélioration de la qualité de vie durable. Les données à très long terme (4 ans) montrent que les effets du traitement demeurent inchangés. D’autres études montrent l’intérêt du sécukinumab dans des localisations spécifiques telles que le cuir chevelu, les ongles ou dans le psoriasis palmo-plantaire. Le sécukinumab est un médicament d’exception dont la prescription initiale est hospitalière mais peut être renouvelée en médecine libérale par les spécialistes, dermatologues, rhumatologues et internistes. L’ixékizumab possède une efficacité comparable à celle du sécukinumab. D’autres thérapies spécifiques devraient voir le jour dans un avenir proche.
Tolérance et sécurité d'emploi des anti-IL17
L’appréhension à l’égard de possibles effets indésirables des biothérapies peut expliquer le retard à leur prescription. Cette crainte est a priori justifiée par le rôle central joué par l’IL17, et s’explique aussi par la récente mise sur le marché de ces thérapies. Une analyse poolée de 10 études comparatives du sécukinumab dans le traitement du psoriasis ne montre pas de différence notable sur les événements indésirables majeurs. À 3 mois, on observe davantage d’effets secondaires dans les groupes sécukinumab et étanercept (inhibiteur soluble du TNF circulant) versus placebo, mais il s’agit essentiellement de rhinopharyngites et infections bronchiques, ainsi que des neutropénies (davantage de neutropénies de grade 2 dans le bras étanercept). À S52, les effets indésirables sous sécukinumab et étanercept sont équivalents : infections superficielles à Candida, pas de surcroît de candidoses sévères, d’infections herpétiques ou à mycobactéries. Il n’est pas observé non plus d’augmentation des tumeurs, hormis de rares cas de carcinome basocellulaire chez des patients précédemment traités par photothérapie, ni des événements cardiovasculaires majeurs. Des résultats de sécurité d’emploi équivalents ont été récemment publiés concernant l’ixékizumab. Au total, les données de sécurité d’emploi des anti-IL17 sont rassurantes. En particulier, il n’a pas été observé d’infections sévères ni d’augmentation du risque cardiovasculaire, des cancers ou des troubles de l’humeur dans les études prospectives avec un suivi de longue durée.
D’après un symposium du laboratoire Novartis avec la participation de C. Paul, J.-P. Lacour et S. Aractingi
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