Publié le 13 juin 2017Lecture 8 min
L'acide hyaluronique en esthétique
Catherine RAIMBAULT-GÉRARD, Metz
L’injection d’acide hyaluronique est une des procédures esthétiques les plus pratiquées actuellement en raison de son innocuité liée à sa résorption complète en plusieurs mois. Son succès est grandissant, car les indications sont multiples pour une correction naturelle du vieillissement cutané, mais on assiste aussi à l’engouement d’une population plus jeune qui souhaite se conformer à des critères de beauté vantés par les réseaux sociaux.
Les acides hyaluroniques (AH) sont utilisés en esthétique pour traiter les rides et les dépressions cutanées depuis les années 1995.
Composition, présentation
L’AH est un des constituants de la substance fondamentale de tout organisme vivant. Sous sa forme libre, fait de chaînes de glycosaminoglycanes obtenues par biofermentation, il est très rapidement dégradé. Il faut donc recourir à un processus de stabilisation ou de réticulation, le plus souvent à l’aide de BBDE pour relier les chaînes entre elles et obtenir des gels viscoélastiques de qualités différentes et durables dans le temps. Ils sont contenus dans des seringues stériles préremplies de 0,5 à 1 ml, prêtes à l’usage. L’AH est un produit totalement résorbable en 3 à 18 mois, parfois plus, ce qui lui assure son innocuité et son succès. La rhéologie est une notion importante précisant non seulement les caractéristiques de réticulation, mais aussi de concentration, de cohésivité, de visco-élasticité, de fermeté et d’hydrophilie, permettant d’adapter l’AH à la zone traitée et à l’effet souhaité, allant de l’hydratation au volume(1).
Quelles sont les indications ?
Les indications se sont multipliées non seulement grâce à une meilleure connaissance des processus de vieillissement, mais aussi à la diversité de la qualité des AH permettant de s’adapter à tous les terrains : hydratation avec les techniques de mésothérapie, correction des sillons naso-géniens, des plis d’amertume, des rides glabellaires, jugales, reconstitution des volumes du tiers moyen, traitement des cernes, de l’ovale du visage, et même rhinoplasties médicales.
L’injection de l’AH se fait soit à l’aiguille soit à la canule (figure 1). Le choix dépend de la préférence du praticien et du type de ride. Les cassures cutanées sont plus faciles à corriger à l’aiguille, alors que la canule assure une plus grande sécurité en limitant le risque vasculaire, en particulier dans les zones profondes et permet un nappage superficiel avec moins d’ecchymoses.
Figure 1. Techniques d’injection.
L’interrogatoire et l’examen du patient réalisés lors de la consultation esthétique préalable, sont indispensables pour rechercher les contre-indications, analyser le mode de vieillissement, et proposer le meilleur plan de traitement en une ou plusieurs séances. Toutefois, une écoute attentive permettra d’établir un compromis entre ce que le patient souhaite améliorer et ce que le médecin perçoit comme défaut à corriger en premier lieu pour une réelle amélioration esthétique. Cette première consultation permet d’informer le patient des risques et effets secondaires, de remettre un devis précisant le nombre de séances, la quantité d’AH utilisée, le coût, et d’obtenir la signature du consentement éclairé(2).
Techniques d'injection
Elles sont multiples.
• Hydratation par des techniques de mésothérapie avec des AH fluides non réticulés, injectés superficiellement, ou des AH faiblement réticulés pour une hydratation plus profonde comme avec les skin boosters.
• Injection à l’aiguille en multipunctures, par exemple pour les rides radiées péri-orales.
• Injection rétrotraçante le long des sillons, des plis d’amertume (figure 2).
• Injection à l’aiguille profonde par bolus dans les zones sans risque vasculaire.
• Injection en éventail en haut des sillons ou sous la commissure labiale.
• Injection à la canule introduite à l’aide d’un pré-trou fait à l’aiguille de même calibre pour des bolus profonds ou un nappage sous la zone à traiter (figure 3). Le diamètre des canules varie de 30 G à 25 G le plus souvent. Plus les canules sont fines et plus elles se comportent comme des aiguilles et sont flexibles. Ainsi, on préfère actuellement les canules plus rigides de 25 G dont le trajet sous la peau est plus facile à contrôler.
Figure 2. Injection rétro-traçante à l’aiguille.
Figure 3. Traitement à la canule : elle est introduite sous la peau grâce à un pré-trou.
Précautions, contre-indications
L’ANSM recommande de ne pas traiter les patients ayant des antécédents allergiques sévères, des saignements anormaux, un mauvais état du site d’injection (infection, cicatrices préexistantes). Il faut se méfier du nomadisme des patients. Ainsi, il est très important de préciser qu’il n’y a jamais eu de traitement par un produit non résorbable auparavant, et il est donc fortement conseillé de remettre après chaque séance un document avec la traçabilité des produits utilisés (nom, numéro de lot).
Les contre-indications concernent les maladies immunologiques évolutives, et des publications d’effet secondaire à type de nodules ou granulome ont été faites pour des patients traités par interféron, ou lors de sarcoïdoses. Il faut éviter les soins dentaires contemporains de ce traitement esthétique.
Effets secondaires(3)
Ils peuvent être immédiats (ecchymose, hématome, œdème, érythème) , semi-retardés (infection, inflammation non spécifique, nécrose) ou retardés à type d’allergie, de pigmentation ou de trouble de la coloration avec un effet bleuté « Tyndall », mais aussi de granulomes(4).
Les AH étant totalement résorbables, il est rare que les effets secondaires soient durables, d’autant qu’il existe un antidote avec la hyaluronidase, enzyme capable de dissoudre rapidement l’AH(5). Une bonne connaissance anatomique est cependant indispensable pour éviter tout risque de nécrose vasculaire qui se fait par embolisation le plus souvent(6). Des cours d’anatomie avec des vidéos de dissection d’excellente qualité sont régulièrement dispensés et permettent de connaître la position des artères et des veines superficielles et profondes, les particularités et variations anatomiques pour éviter tout risque de nécrose, voire de cécité. Ce risque est d’autant plus important que l’injection est réalisée sous pression et avec de grandes quantités d’AH. Ainsi, au niveau de la glabelle, les injections doivent être superficielles dans le derme ; sur le nez, les injections sont profondes contre l’os ou le cartilage, il est préférable d’utiliser une canule pour la volumétrie du tiers moyen(7).
Déroulement d'une ou des séance(s)
Le plan de traitement a été établi en accord avec le patient, et peut nécessiter 1 à 3 séances espacées de 3 mois en moyenne, mais ce délai peut être plus long car il dépend aussi du budget du patient et de ses souhaits pour un traitement ciblé sur une zone ou pour un rajeunissement global. Le praticien s’assure que les recommandations ont bien été respectées car il faut éviter toute prise d’aspirine ou d’anti-inflammatoire les jours précédents pour minimiser les risques d’ecchymose, ne pas suivre de soins dentaires contemporains du traitement, la peau doit être saine, la prise d’antiherpétique en cas de traitement de la zone péribuccale a été débutée 3 jours auparavant chez les patients sujets à l’herpès.
Il est important, avant de débuter la procédure de réaliser des clichés photographiques de face, de trois quarts et de profil. Une anesthésie de contact par crème à la lidocaïne ou par bloc tronculaire est proposée au patient sensible. La peau est soigneusement désinfectée et l’injection d’AH peut commencer. Elle est lente et régulière, et pour une plus grande régularité, des dispositifs d’aide à l’injection, tels que certains stylos électriques, pourront être utilisés.
Un massage à l’aide d’une crème à l’arnica immédiatement après la séance est utile, son application par le patient peut être poursuivie jusqu’à disparition des « bleus », habituellement en moins d’une semaine. L’application d’un écran solaire en été et le maquillage sont autorisés dès le lendemain.
Il peut être utile de revoir le patient en contrôle après quelques jours pour juger de la qualité du résultat, surtout lors de traitement de certaines zones réputées plus difficiles, comme la correction des cernes ou de la zone péribuccale.
Quand débuter les traitements esthétiques ?
Les acides hyaluroniques sont hydratants et st imulent la synthèse du tissu collagène et élastique(8). Leur efficacité dépasse donc celle de la seule quantité injectée. On observe une amélioration de la qualité de la peau et un lissage des rides. Les techniques de volumétrie reconstituent les volumes tels qu’ils existaient auparavant et permettent la restitution du triangle de la jeunesse. Un sillon marqué à l’âge de 40 ans, des cernes ou l’apparition d’une vallée des larmes peuvent donc être corrigés avec des quantités modérées d’AH dès leur apparition. Il sera plus difficile d’améliorer une peau marquée de multiples rides après la soixantaine. Les traits du visage, la dynamique faciale, ne sont pas modifiés lorsque les soins sont effectués progressivement avec mesure et sens esthétique, pour respecter le souhait des patients qui veulent une correction naturelle, un effet bonne mine, et recherchent la « French touch ». Malgré tout, sous l’influence des médias, on assiste actuellement à une demande de soins esthétiques plus visibles, lèvres pulpeuses, augmentation des pommettes, chez des patientes de plus en plus jeunes ! Là encore, le sens esthétique intervient pour une sublimation des traits en respectant le naturel.
Figure 4. Traitement des sillons nasogéniens, des rides péri-orales :
2 séances à un an d’intervalle avec 2 ml d’acide hyaluronique par séance.
Figure 5. Sillon : comparaison des 2 techniques : aiguille rétrotraçante en bas,
canule en haut. Pour un bon résultat à la canule, l’injection doit être superficielle.
Figure 6. Ourlet des lèvres : injection à l’aiguille.
Figure 7. Ourlet et augmentation du volume des lèvres.
Figure 8. Injection à la canule.
Figure 9. Sillon amertume ovale injection à la canule. Un seul point d’entrée.
Figure 10. Cernes traitement à la canule.
Figure 11. Cernes aiguille.
Figure 12. Cernes et volumétrie du tiers moyen.
Figure 13. Volumétrie du tiers moyen.
Figure 14. Rhinoplastie médicale.
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