Publié le 14 oct 2021Lecture 4 min
Démembrement du syndrome d’activation mastocytaire pédiatrique
Caroline GUIGNOT, Rennes
Le syndrome d’activation mastocytaire est un ensemble récemment constitué, regroupant des manifestations dont la cause et le profil varient. Chez l’enfant, il est important de noter que le pronostic est en majorité favorable et doit être considéré à ce titre comme une maladie différente de celle de l’adulte.
Le syndrome d’activation mastocytaire (SAMA) est une entité récente qui regroupe les différentes situations cliniques associées à une libération massive de médiateurs pro-inflammatoires et vasoactifs par les mastocytes, cellules de l’immunité innée se situant majoritairement au niveau cutané et épithélial.
Le SAMA est diagnostiqué face à la présence d’au moins deux des trois critères suivants :
des manifestations cliniques, continues ou évoluant par poussées et touchant au moins deux organes (typiquement peau et digestif, mais aussi respiratoire, neuropsychologique, osseux, anaphylactique...) ;
une tryptase sérique de +2 μg/L et +20 % durant la crise par rapport à la valeur basale ;
une réponse aux tests d’épreuve d’antidégranulation après traitement par antihistaminiques (antiH1 et antiH2) et antileucotriènes (antiLT).
SAMA secondaire : facile à diagnostiquer
On distingue trois types de SAMA selon le caractère des mastocytes : primaire, secondaire et idiopathique. Le SAMA secondaire est immunologique et est relativement facile à diagnostiquer, le plus généralement à la suite d’une allergie IgE médiée ; dans ce cas, les mastocytes sont qualitativement et quantitativement normaux. Restent les deux autres causes qu’il convient d’expliciter.
SAMA primaire majoritairement cutanées chez l'enfant
Les SAMA primaires, relativement rares, sont liés à une prolifération clonale des mastocytes. Ils peuvent engendrer des manifestations cutanées à type d’urticaire, de prurit, de flushs, des manifestations extracutanées principalement d’ordre digestif (diarrhées fréquentes, reflux gastro-œsophagien, douleurs abdominales...), respiratoire (congestion et prurit nasal) ou encore neuropsychologique (fatigue, trouble du sommeil), ostéo-articulaire (douleurs), urologique (pollakiurie), anaphylactique... Comme le montre la classification 2016 de l’OMS, il existe trois types de SAMA primaires : ceux limités à la peau (mastocytose cutanée), ceux associant signes cutanés et extracutanés (mastocytose systémique dont la gravité est variable, depuis le caractère indolent jusqu’à la leucémie à mastocytes) et le sarcome mastocytaire.
Les mastocytoses cutanées se présentent sous forme de maculopapules larges (rouge-brun, sur le tronc et les membres, mais aussi sous forme souvent bulleuse au niveau du cuir chevelu) ou, parfois, plus foncées et petites. Ces formes cutanées représentent 99 % des cas de l’enfant et apparaissent avant l’âge de 2 ans dans 9 cas sur 10 ; elles ont une évolution favorable en grande majorité. Plus rarement, il s’agit d’une mastocytose cutanée dite diffuse, avec un infiltrat massif, des lésions rouge-brun sans intervalles de peau saine, ou bien d’un mastocytome, c’est-à-dire une lésion nodulaire souvent unique, parfois bulleuse, retrouvée le plus souvent chez les nourrissons de moins de 3 mois.
Le diagnostic d’une mastocytose est facilement orienté devant un signe de Darier positif (apparition d’une papule urticarienne dans les quelques minutes suivant le frottement d’une lésion). Parallèlement, il faut rechercher une atteinte systémique (foie, ganglions, courbe de croissance...), réaliser un bilan standard (NFS, bilan hépatique, phosphocalcique, IgE) et doser la tryptasémie. Une biopsie n’est envisagée que s’il existe un doute diagnostique, à la recherche d’une forme diffuse (mutation c-KIT).
SAMA idiopathique : une forme non immunologique plurifactorielle
Le SAMA idiopathique est la forme la plus fréquemment rencontrée chez l’enfant. Il s’agit d’une suractivité des mastocytes sans prolifération, qui engendre des épisodes de dégranulation fréquents. Les facteurs favorisants – alimentaires, médicamenteux, émotionnels, physiques – vont activer les mastocytes.
La situation type est celle d’un petit enfant présentant de nombreuses allergies alimentaires (plus de 10 dans 1 cas sur 2) : la consommation d’un tel aliment conduit à des manifestations cutanées (jusqu’au décollement dans les cas les plus sévères), de nombreuses diarrhées, un reflux, une irritabilité, des réveils fréquents... Les émotions, le stress ou les changements de température (eau trop chaude ou très fraîche) sont aussi des déclencheurs fréquents.
Chez les enfants plus grands, le SAMA idiopathique est plus volontiers anaphylactique avec des intervalles libres, sans allergènes identifiés. Chez l’adolescent, enfin, les signes sont surtout cutanés et neuropsychologiques.
En clinique, les enfants pour lesquels le diagnostic est évoqué arrivent souvent en consultation spécialisée après de nombreuses explorations et hypothèses diagnostiques, notamment allergiques. Le SAMA idiopathique est évoqué face à un faisceau d’arguments : au moins 2 organes touchés, non attribuable à une autre étiologie, valeur de tryptasémie évocatrice, réponse aux traitements antidé-granulants (antiH1, antiLT). Une mastocytose doit être écartée. Le bilan est globalement le même que pour les SAMA primaires, mais un bilan spécifique peut être envisagé face à une cassure de la courbe de croissance (recherche de MICI). Le traitement de première intention est l’association d’un antiH1, d’un antiH2 et d’un antiLT : la réponse thérapeutique constitue un test diagnostique.
D'après le Séminaire de dermatologie pédiatrique de l’hôpital Necker-Enfants malades vendredi 25 juin 2021, « Syndrome d’activation mastocytaire : une réalité complexe » par Laura Polivka (Paris)
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