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Dermatite atopique, Eczéma

Publié le 22 fév 2010Lecture 6 min

Les avancées thérapeutiques dans la dermatite atopique

P. BERBIS, Service de dermatologie, Hôpital Nord, Marseille

La dermatite atopique (DA) est une pathologie relativement difficile à traiter en raison de la quotidienneté des soins qu’elle requiert. Son retentissement psychologique et social est important, notamment pour les parents, qui peuvent s’épuiser dans la répétition des soins à leur enfant. La demande de nouvelles solutions thérapeutiques est donc forte. Le traitement de base de la DA repose sur l’application quotidienne de dermocorticoïdes et d’émollients. Pour les DA sévères, il existe des alternatives thérapeutiques dont nous vous proposons de détailler ici les nouveautés recensées au cours des trois dernières années.

Immunosuppresseurs par voie générale ● Ciclosporine par voie générale : une méta-analyse critique Rappelons que la ciclosporine est indiquée dans le traitement des formes sévères de DA de l’adulte, en cas d’intolérance, d’inefficacité ou de contreindication de traitements classiques (photochimiothérapie, photothérapie) (Dictionnaire Vidal®). J. Schmitt et coll. (1) ont colligé 14 études (602 patients au total). Ils relèvent plusieurs biais rendant leurs conclusions discutables. Après 2 semaines de traitement, il existe un effet-dose net : amélioration moyenne de 22 % avec une dose ≤3 mg/kg/j, amélioration moyenne du score initial de 45 % pour des doses ≥ 5 mg/kg/j (la posologie maximale recommandée [Dictionnaire Vidal®] est de 5 mg/kg/j). Après 6 à 8 semaines de traitement, l’amélioration moyenne est de 55 % (48 à 62 %). Seules 3 études ont évalué les rechutes à l’arrêt de la ciclosporine per os : 50 % des cas dans les 2 premières semaines, 73 à 80 % à 6 semaines. ● Méthotrexate (MTX) : premier essai encourageant mais à confirmer S.C. Weatherhead et coll. (2) rapportent les résultats d’une étude ouverte de dose-ranging évaluant le MTX chez 12 adultes présentant des DA modérées à sévères. Une dose moyenne de 15 mg par semaine pendant 24 semaines entraîne une amélioration moyenne de 52 %. La qualité de vie est améliorée. L’effet bénéfique semble prolongé. Rappelons que le MTX n’a pas l’AMM dans cette indication. Des études contrôlées sont nécessaires pour évaluer l’intérêt potentiel du MTX, sa place dans la stratégie thérapeutique, et sa tolérance à moyen et long terme dans cette indication. ● Mycophénolate mofétil (Cellcept®) M.L. Murray et J.B. Cohen (3) rapportent leur expérience rétrospective à propos de 20 patients traités par cet immunosuppresseur. L’amélioration a été importante dès les 4 premières semaines, 10 patients ayant même pu stopper le traitement en raison d’un effet quasi complet. Cependant, les effets secondaires infectieux sont fréquents : zona dans 4 cas, infections staphylococciques dans 2 cas, un herpès. ● Rituximab Le rôle pathogène du lymphocyte B dans la DA est bien connu, par la sécrétion abondante d’IgE (4). Le rituximab (Mabthera®) est un anticorps anti-CD20 qui bloque l’action des lymphocytes B. Son indication reconnue est le traitement de certains lymphomes B. Cette molécule a fait la preuve de son efficacité dans des pathologies auto-immunes telles que la dermatomyosite. Deux études pilotes présentent des résultats hétérogènes : pour l’une, il y a amélioration significative après 2 perfusions de 1 000 mg de rituximab chez 6 patients, corrélée à une réduction de l’expression d’IL-5 et IL-13 (5) ; pour l’autre, les résultats sont décevants (doses plus faibles) chez 2 patients (6). Le rituximab, s’il fait la preuve de son efficacité, sera reservé à des formes sévères et réfractaires aux traitements conventionnels en raison d’effets secondaires potentiels sévères. ● Omalizumab L’omalizumab est un anticorps monoclonal chimérique IgG kappa, anti-IgE (se fixe sur le récepteur de haute affinité pour les IgE [FcεRI et FcεRII]), présentes à la surface des mastocytes, des basophiles, mais aussi sur les cellules dendritiques. Il a montré une efficacité dans le traitement des asthmes sévères lorsque le taux d’IgE était inférieur à 700 UI/mm3. Les études pilotes ayant évalué l’intérêt de l’omalizumab dans le traitement de la DA sont peu nombreuses et ont donné des résultats contradictoires(7-11) : 3 cas nettement améliorés chez des adolescents, amélioration signimmicative dans 7 cas (7 à 58 ans), 3 échecs dans l’étude princeps(7), 6 améliorations sur 11 (dont 2 seulement de plus de 50 %). Signalons que dans la plupart des DA sévères, le taux des IgE est nettement supérieur à 700 UI/mm3. Traitements immunosuppresseurs topiques : l’heure des méta-analyses En janvier 2006, la FDA a émis un signal d’alerte concernant la sécurité au long cours des inhibiteurs de la calcineurine topiques (pimécrolimus, tacrolimus), en indiquant qu’elle n’était pas connue précisément. Cette réaction était consécutive à la constatation de prescriptions fréquentes hors recommandations chez des enfants de moins de 2 ans et le report de quelques observations de cancers et de lymphomes dans le suivi post-marketing (12). Le libellé de l’indication a donc été modifié : – deuxième ligne de traitement ; – traitement court, intermittent ; – dermatites atopiques modérées à sévères chez l’enfant de 2 ans au moins (forme à 0,03 %) et chez l’adulte (formes à 0,03 % et à 0,1 %), non immunodéprimés, qui n’ont pas répondu à des traitements topiques conventionnels de la DA (dermocorticoïdes) ou ayant des contre-indications à ces traitements. Deux méta-analyses ont récemment été publiées, et permettent de positionner les inhibiteurs de la calcineurine, notamment par rapport aux dermocorticoïdes. J. Yan et coll.(13) ont colligé les données de 8 essais conduits chez l’enfant. En termes d’efficacité, aucune différence significative n’a été mise en évidence entre tacrolimus 0,03 % et tacrolimus 0,1 %. Le tacrolimus est supérieur à l’hydrocortisone (p < 0,001) et légèrement supérieur au pimécrolimus (p = 0,04). Les principaux effets secondaires à court terme sont la sensation de prurit et de brûlure superficielle. Aucune différence significative n’est rapportée entre tacrolimus 0,03 % et tacrolimus 0,1 % ainsi qu’entre tacrolimus et pimécrolimus. En revanche, le tacrolimus est moins bien toléré que l’acétate d’hydrocortisone. La méta-analyse de D.M. Aschcroft et coll.(14) a colligé 4 186 patients traités par tacrolimus ou pimécrolimus : – le tacrolimus 0,03 % est moins efficace que le butyrate d’hydrocortisone 0,1 % à 3 semaines ; – le tacrolimus 0,1 % est aussi efficace à 3 semaines que le butyrate d’hydrocortisone 0,1 % ; – le tacrolimus 0,1 % est aussi efficace que le valérate de bétaméthasone 0,1 % ; – le tacrolimus 0,1 % (tronc + face) est plus efficace que l’association butyrate d’hydrocortisone 0,1 % (tronc) et acétate d’hydrocortisone (face) ; – à 12 semaines, le tacrolimus 0,1 % est supérieur au tacrolimus 0,03 % ; – le pimécrolimus 1 % est inférieur au valérate de bétaméthasone 0,1 % ; – à 6 mois, le pimécrolimus 1 % est inférieur à l’association acétonide de triamcinolone (tronc) et acétate d’hydrocortisone (face) ; – à 12 mois, les deux traitements sont équivalents. Autres moyens ● La fin des régimes dits hypoallergéniques préventifs chez la femme enceinte ? Une analyse type Cochrane (15) colligeant 324 familles n’a pas conclu au bénéfice, en termes préventifs chez l’enfant, de développer des manifestations atopiques, d’un régime hypoallergénique au cours de la grossesse. Ces régimes entraînaient par contre des petits poids de naissance. ● Photothérapie : une métaanalyse intéressante (16) Neuf études contrôlées ont été retenues : trois études ont montré que les UVA1 étaient plus efficaces que l’association UVA-UVB ; deux études ont conclu à la supériorité des UVB TL01 sur les UVA et les UVA1.   Points forts   Absence d’intérêt préventif des régimes hypoallergéniques chez la femme enceinte.   Absence probable d’intérêt des anti-TNF alpha dans le traitement de la DA.   Ciclosporine : une méta-analyse aux résultats mitigés.   Perspectives : méthotrexate ? nouvelles biothérapies (rituximab, omalizumab) ?   Inhibiteurs de la calcineurine topique : rationalisation des indications, notamment chez l’enfant.

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