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Cancérologie

Publié le 20 oct 2022Lecture 5 min

Actualisation des recommandations de prise en charge du mélanome

Caroline GUIGNOT, Lille

Évolution des approches diagnostiques, place des immunothérapies, prise en charge des mélanomes métastatiques : l’EADO 2022 a été l’occasion de faire le point sur les spécificités des mélanomes muqueux et les recommandations actualisées relatives au mélanome cutané.

Des experts de la European association of dermato-oncology ont présenté en mai dernier les principaux points ayant évolué dans le cadre des recommandations de l’EADO sur le diagnostic et la prise en charge du mélanome. Le nouveau texte sera publié dans l’European journal of cancer avant l’été ; le précédent datait de 2019. Sur le plan diagnostique, les outils habituels d’analyse visuelle, de comparaison intra-individuelle et d’évolution dans le temps restent indispensables. La spectroscopie d’impédance électrique et les algorithmes d’intelligence artificielle ne sont pas pour l’heure recommandés, mais ils trouveront probablement leur place quand les données cliniques seront suffisantes. Plusieurs éléments apparaissent fondamentaux dans le cadre diagnostique : d’une part, l’examen du corps entier, même s’il reste parfois difficile à réaliser en routine clinique. Il est en tout cas particulièrement important chez les patients à haut risque ; d’autre part, la dermoscopie digitale séquentielle, notamment chez les patients à risque ayant un nombre total de nævus élevé ; Enfin, les recommandations placent également la microscopie confocale par réflectance comme une approche pertinente pour statuer sur des lésions dont l’évaluation est équivoque par les outils classiques Dans tous les cas, la confirmation histologique après biopsie est indispensable en cas de suspicion de lésion cutanée cancéreuse. Une fois le diagnostic de mélanome confirmé, le bilan doit notamment comporter une échographie des ganglions loco-régionaux, ainsi qu’une IRM cérébrale avec produit de contraste lorsque les ganglions sont palpables et le stade de la tumeur avancé (IIC à IV). La recherche de mutation BRAF-V600 E/K est désormais préconisée aux stades IIB-C, la recherche des mutations NRas et c-KIT n’ont pas d’intérêt pour l’heure. De même, le profit d’ex- pression génique et la biopsie liquide sont prometteurs mais ne disposent pas de données cliniques suffisantes. > Nouveautés autour des recommandations thérapeutiques Sur le plan des principes généraux, l’exérèse chirurgicale de la tumeur primaire et des ganglions tend à être de moins en moins invasive. Ainsi, les recommandations concernant la biopsie du ganglion sentinelle ou la réalisation d’une lymphadénectomie sont modulées. Alors qu’elles étaient indiquées comme « devant être réalisées », elles doivent désormais « être posées », invitant en cela à une décision thérapeutique partagée avec le patient. Concernant les stades III (IIIA à IIID), un traitement adjuvant par anti-PD-1 est recommandé, quel que soit le statut mutationnel. Un anti-BRAF-MEK peut- être proposé à ceux ayant une mutation BRAF-V600 E/K. Pour les mélanomes de stade IV totalement reséqués, le nivolumab peut être proposé indépendamment du statut mutationnel. Le texte insiste sur les précautions à prendre pour les lésions de stade IIIA : lorsque les métastases ganglionnaires sont inférieures à 1 mm de diamètre, le bénéfice-risque du traitement adjuvant est moins flagrant et doit être discuté avec le patient. Pour les mélanomes métastatiques de stade IV, le traitement systémique repose sur une immunothérapie avec un inhibiteur de checkpoint immunitaire ; il doit être proposé en première ligne, quel que soit le statut BRAF. Il repose principalement sur un anti-PD-1 seul ou associé à un anti-CTLA4, sans besoin de déterminer le statut PD-1 de la tumeur. Un anti-MEK peut être proposé en deuxième ligne, si résistance à l’immunothérapie et présence d’une mutation BRAF-V600 E/K. Lorsque le pronostic est réservé (lésion agressive, score PS faible, métastase cérébrale...), et que la tumeur présente une mutation BRAF-V600 E/K, une première ligne de traitement par un anti-BRAF-MEK peut être proposée en alternative à l’immunothérapie. La chimiothérapie peut être considérée chez tous les patients au stade IV qui présentent un bon score PS et dont la tumeur résiste à l’immunothérapie et aux thérapies ciblées. Elle est considérée comme la meilleure prise en charge palliative. Enfin, une attention a été portée au traitement des mélanomes associés à des métastases cérébrales, cas relativement fréquent associé à un mauvais pronostic. Dans ce cas, la radiothérapie stéréotaxique est proposée aux patients éligibles ; la chirurgie pouvant être envisagée dans le cas contraire. La radiothérapie du cerveau entier n’est plus recommandée. Par ailleurs, l’immunothérapie combinée (inhibition de BRAF+ MEK et immunothérapie anti- PD-1) doit être envisagée en association. Une thérapie ciblée peut être utilisée en alternative lorsqu’une mutation BRAF- V›600E/K est identifiée. > Focus sur les mélanomes muqueux Le mélanome muqueux reste rare et associé à une histoire naturelle, son pronostic et sa prise en charge sont significativement différents de ceux du mélanome cutané. Il présente une charge mutationnelle plus faible que le mélanome cutané, laquelle, lorsqu’elle existe, concerne essentiellement la voix MAPK. Dans ces pathologies, la biopsie reste indispensable et l’imagerie du corps entier doit être entreprise avant la chirurgie qui, elle, doit concilier l’enjeu d’être efficace (marges saines) et peu invasive afin de permettre une réexérèse et de préserver les fonctions – notamment lorsque le mélanome muqueux est anorectal (sphincter) ou vaginal (urètre, clitoris). Dans ces deux dernières localisations, la lymphadénectomie n’est pas recommandée ; une biopsie des ganglions sentinelles est préconisée si une thérapie adjuvante ou la participation à un essai clinique est envisagée. Ces tumeurs sont d’une manière générale plus difficiles à prendre en charge sur le plan chirurgical comme pharmacologique (lésions multifocales, risque métastatique élevé...). Le taux de réponse observé dans les études cliniques est globalement de moitié inférieur à celui observé dans les mélanomes cutanés, que le traitement soit fondé sur l’ipilimumab, le nivolumab ou leur association. Enfin, les données cliniques relatives à la place d’un traitement adjuvant ou néoadjuvant sont insuffisantes pour conclure, mais des études sont en cours pour répondre à ces situations. Symposium «Melanoma guidelines update», EADO 2022, 21-23 avril 2022, Séville

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