Publié le 03 juil 2012Lecture 4 min
Lésions ecchymotiques : à propos d’un cas
N. ELKIHAL*, S. SAASAA**, K. AZROUT*** *Service de dermatologie **Médecine générale ***Médecin directeur Hôpital Hassan II, Dakhla, Maroc
La patiente, une enfant âgée de 5 ans, est vue en consultation pour des lésions ecchymotiques d’installation brutale.
Observation L’enfant est issue d’une grossesse à terme, fille unique, bien vaccinée selon le programme national d’immunisation marocain, sans antécédents pathologiques notables. L’examen montre des macules ecchymotiques arrondies prurigineuses avec une surface finement squameuse. Les lésions siègent au niveau du menton et de la face interne de l’avant-bras (Illustration et figure 1). Le reste de l’examen montre une peau sèche avec signe de Dennie Morgan et une kératose pilaire de la face externe des membres en faveur d’une dermatite atopique. Les lésions évoluaient vers un éclaircissement du centre et une bordure qui reste plus pigmentée, donnant un aspect en cocarde (figure 2). La petite fille a été vue par un médecin généraliste qui prescrit un antimycosique local (Dermofix ® crème, une application par jour pendant 15 jours). Un bilan biologique a été réalisé : – GB : 10 000/mm3 ; – plaquettes à 554 000/mm3 ; – VS à 7 mm ; – TP : 75 % ; INR : 1,27 ; TCA : 33/31. La biopsie cutanée a montré à l’histologie des remaniements inflammatoires non spécifiques, et l’examen mycologique est négatif. Les diagnostics évoqués ont été : – dermatose infectieuse, type Orf ; – toxidermie, type érythème pigmenté fixe ; – ou granulome annulaire. L’évolution est marquée par une guérison spontanée avec disparition des lésions, sans cicatrices. Figure 2. Trois mois plus tard, la patiente revient avec les mêmes lésions, aux mêmes endroits, suite à la prise d’amoxicilline protégée pour des angines. L’interrogatoire retrouve la notion de prise de la même molécule, 48 heures avant l’apparition du premier épisode. Le diagnostic retenu est celui d’un érythème pigmenté fixe à l’amoxicilline protégée. La fiche de pharmacovigilance a été remplie et envoyée. Discussion Beaucoup de médicaments d’usage courant induisent des toxidermies, concernant 1 à 3 % des utilisateurs de médicaments. Les aspects cliniques des toxidermies sont variables et l’origine médicamenteuse est difficile à confirmer. Le diagnostic est posé sur l’association de plusieurs critères de présomption. Le seul aspect clinique d’origine médicamenteuse est l’érythème pigmenté fixe. Les lésions apparaissent dans les heures (48 heures) qui suivent l’ingestion du médicament inducteur. Au nombre de 1 à 10, il s’agit de plaques érythémateuses arrondies de quelques centimètres de diamètre, souvent douloureuses et infiltrées (érythème), symétriques sur le tronc et les membres. Notre patiente avait 4 plaques symétriques au visage et une isolée à la face interne de l’avant-bras. Elles peuvent se recouvrir d’une bulle. Les lésions inflammatoires disparaissent en quelques jours en laissant des plages pigmentées brunes ou ardoisées. En cas de réintroduction du médicament inducteur, les lésions récidivent aux mêmes sites (fixe). C’est le cas de notre patiente. La recherche de la cause d’une toxidermie repose sur un faisceau d’arguments dont aucun n’a de valeur absolue. Notre patiente présente une dermatite atopique, mais l’atopie n’est pas un facteur de risque de toxidermies. Le degré d’imputabilité de chaque médicament pris par le patient est mesuré par un score qui intègre des données chronologiques et des données sémiologiques (encadré). Toxidermie : critères d’imputabilité d’un médicament Imputabilité intrinsèque • Chronologique – Délais évocateurs. – Les délais évocateurs différents selon le type de réaction. – Évolution. – Amélioration après arrêt du médicament ou une aggravation après sa poursuite. – Réintroduction. – Une récidive après réintroduction accidentelle, ou moins rarement un antécédent d’effet analogue lors d’une prise antérieure, à éviter. • Sémiologique – La clinique est-elle caractéristique d’un accident médicamenteux ? Dans leur très grande majorité, les toxidermies se manifestent par des signes cutanés non spécifiques, difficiles à distinguer d’affections cutanées d’autres causes. – Élimination des autres causes. – Tests. – Les situations, où la valeur de ces tests a été validée, sont rares (prick-tests pour les réactions immédiates à la pénicilline ou aux curarisants). Imputabilité extrinsèque Notoriété fondée sur les données de pharmacovigilance et les publications préalables.
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