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Congrès

Publié le 27 mar 2020Lecture 4 min

Quel est le rôle des IgE dans l’urticaire chronique spontanée ?

M.DEKER, Paris

Avec l’avancée thérapeutique représentée par l’arrivée des anti-IgE, il paraît intéressant de s’interroger sur le rôle des IgE dans l’urticaire chronique spontanée (UCS). Nous savons, en effet, que 40 % des sujets ayant une urticaire sont atopiques. Les mécanismes sous-jacents à l’urticaire chronique spontanée sont mieux connus aujourd’hui, bien qu’il persiste quelques lacunes. La stratégie thérapeutique est simple, passant des antihistaminiques H1 à dose croissante à l’omalizumab. Hormis un faible pourcentage de non-répondeurs au traitement, la majorité des patients peuvent aujourd’hui être traités efficacement.

Quels sont les acteurs de l'urticaire chronique spontanée ? Le mastocyte joue un rôle central. Sa première fonction est d’offrir une ligne de défense contre les pathogènes en sous-épithélial, par le biais de ses multiples récepteurs qui sont activés de deux façons : non immunologique et immunologique. Le mastocyte peut être stimulé selon un mécanisme non immunologique par des pathogènes via les Toll-like récepteurs, le complément, les neuropeptides (expliquant les poussées urticariennes déclenchées par le stress et l’effort), les opiacés, les histaminolibérateurs (médicaments, aliments), les protéines de la coagulation, ainsi que via un autre récepteur médicamenteux MRGPRX2. L’activation immunologique passe en particulier par la fixation d’IgE aux récepteurs membranaires FcεR1, mais aussi d’IgG sur les récepteurs FcγR, de même que les complexes immuns circulants et les lymphocytes T. Ces deux types d’activation peuvent être impliqués dans la physiopathologie de l’urticaire chronique spontanée. Des IgE anti-soi ont été mises en évidence, participant à l’autoallergie (type I de la classification de Gell et Coombs). L’hypersensibilité (HS) de type II peut aussi être en cause avec la mise en évidence d’IgG anti-FcεR1 et antiIgE. La responsabilité de l’HS de type III médiée par les complexes immuns n’est pas encore bien démontrée. L’HS de type IV est également possible du fait de la mise en évidence de lymphocytes T dirigés contre le récepteur FcεR1. La prévalence de l’HS type I est inconnue, mais des auto-anticorps anti-IgE ont été mis en évidence : anti-peroxydase, antiDNA et anti-IL-24, dont la présence serait un marqueur de sévérité de l’UCS auto-immune. En outre, d’autres pathologies auto-immunes (thyroïdite) sont des comorbidités connues de l’UCS. Des auto-IgE ont aussi été mises en évidence dans d’autres maladies inflammatoires cutanées (pemphigoïde bulleuse). Il existe par ailleurs des points communs en histologie avec la phase retardée des réactions allergiques IgE-dépendantes (infiltrat lymphocytaire). Enfin, l’efficacité de l’omalizumab, qui fixe les IgE circulantes, fournit un argument supplémentaire en faveur de la participation de l’HS type I. Toutefois, cela reste à démontrer formellement. L’UCS type II fait intervenir des auto-anticorps IgG anti-FcεR1 et anti-IgE chez 35-40 % et 5-10 % des patients respectivement, ainsi que des IgG anti-FcεR2. Ces auto-anticorps IgG sont à des taux plus élevés chez les patients ayant une UCS, comparativement aux sujets sains ou atopiques ou ayant une urticaire chronique inductible ou un psoriasis. Des tests au sérum autologue ont été réalisés, qui confirment la participation des IgG dans l’UCS. La plasmaphérèse permet d’améliorer l’UCS. La présence des auto-anticorps anti-FcεR1 est souvent corrélée avec une plus longue durée de la maladie, à sa sévérité et à une plus faible réponse au traitement antihistaminique. L’omalizumab est efficace en diminuant le taux d’IgE fixées sur les mastocytes, donc l’action des IgG anti-IgE, le taux des récepteurs FcεR1 sur les mastocytes et les basophiles, donc l’effet des autoanticorps IgG. Il reste à préciser le rôle de l’HS type III et IV, à réaliser des études de déplétion des auto-IgE, à mieux caractériser la temporalité entre l’apparition des auto-anticorps et la survenue d’une UCS, à harmoniser les tests pour la détection des formes autoimmunes d’UCS, et à mieux caractériser les profils cliniques et la réponse thérapeutique. Peut-on prédire la réponse aux traitements ? L’UCS est définie par des poussées pluri-hebdomadaires depuis plus de 6 semaines, superficielles et/ou profondes (associées dans 90 % des cas). Les femmes sont davantage touchées et souvent en excès pondéral. On estime à 10 % les formes résistantes aux antihistaminiques. Les recommandations préconisent en 1re ligne les antihistaminiques à dose normale, en 2e ligne à dose double ou triple. En cas d’échec au bout de 3-4 semaines, l’ajout d’omalizumab est recommandé. En 4e ligne, il est toujours possible de revenir vers la ciclosporine associée à l’antihistaminique. Dans les études, 38 % des patients répondent à une dose normale d’anti-H1, 63 % répondent à l’augmentation de dose, mais principalement sur le prurit. Les facteurs cliniques prédisant une résistance au traitement standard sont : un début tardif après 45 ans, la présence concomitante d’une urticaire inductible, de multiples épisodes de rechutes. En cas de suspicion de nonréponse au traitement antihistaminique, il faut évaluer l’observance du traitement et la sévérité de l’urticaire, et rechercher la prise d’autres médicaments (AINS, corticoïdes, morphiniques, etc.). Les scores cliniques permettent d’évaluer la sévérité de la maladie et l’efficacité du traitement (UAS etUCT), ainsi que la qualité de vie (DLQI). L’omalizumab est globalement très efficace, à la dose de 300 mg/mois et permet une diminution rapide du prurit. Le traitement doit être maintenu pour arriver à un plateau d’amélioration. Il existe des répondeurs, plus ou moins rapides, et des nonrépondeurs. La réponse au traitement dépend des taux d’IgE avant traitement ; elle est moins bonne quand ce taux est bas (33 % de risque de non-réponse vs 5 % si les IgE sont élevées). En cas d’efficacité insuffisante de l’omalizumab, il est possible de rapprocher les injections (toutes les 3 ou 2 semaines) ou d’augmenter la posologie (450 puis 600 mg). L’échec est défini par la persistance de lésions après 2 injections à 600 mg espacées de 4 semaines. Lorsque le traitement est efficace se pose la question de son arrêt. Il ne faut jamais arrêter brutalement mais espacer les injections toutes les 6 puis 8 semaines. Dans certains centres, les injections sont faites toutes les 16 semaines. En cas de rechute, il faudra revenir à la fréquence d’injections antérieure.

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