Publié le 28 sep 2020Lecture 3 min
Facteurs de risque d’échec du traitement de la gale
F. CHASSET, Paris
La gale est un problème majeur de santé publique. Elle affecte environ 130 millions de personnes dans le monde. La prévalence a été estimée entre 2-4 % aux États-Unis et en Europe. Le taux d’échec du traitement est estimé à environ 30 % des cas, ce qui participe à la persistance de l’épidémie. Les facteurs de risque de réinfestation sont la promiscuité, la pauvreté et une hygiène faible.
Chez les patients hospitalisés, les facteurs de risque d’échec du traitement incluent l’immunodé pression, la démence et la gra batisation. À l’inverse, il n’y a pas d’étude ayant évalué les facteurs de risque d’échec du traitement en population ambulatoire. Cette étude a inclus consécutivement entre juin 2011 et décembre 2013 tous les patients vus au centre hospitalier de Rouen, ainsi que dans 14 cabinets de dermatologie dans la région. Les critères d’inclusion étaient un diagnostic de gale fait cliniquement et/ou avec un dermatoscope ; l’accord pour remplir un questionnaire standardisé sur les conditions de vie et le traitement reçu ainsi qu’une réévaluation à 3 mois pour pouvoir juger de l’efficacité du traitement. Les patients étaient divisés en 2 groupes : groupe succès (guérison de la gale à 3 mois) et groupe échec (correspondant à la persistance de symptômes à 3 mois, ou une consultation pour la persistance de signes alors qu’un traitement préalable avait été initié pour une gale). Il n’y avait aucune recommandation quant au choix du traitement local ou systémique ainsi que sur les mesures d’hygiènes à proposer.
Parmi les 231 patients inclus, 21 (9 %) ont été exclus car ils n’ont pas pu être réévalués à 3 mois. Les facteurs de risque d’échec de traitement liés aux caractéristiques de l’infection et aux conditions de vie étaient l’apparition des symptômes > 1 mois avant le diagnostic odds ratio (OR 3,97 [IC95 % : 2,10- 7,51], la présence d’une co-infestation dans la famille (OR = 1,82 [IC95 % : 1,05-3,16]) et la présence d’une garde d’enfant (OR = 2,55 [IC95 % : 1,03-6,32]). Les facteurs de risque d’échec de traitement liés au traitement reçu étaient la présence d’un traitement en monothérapie locale par benzoate de benzyle ou ivermectine par rapport à la combinaison des deux (OR = 2,15 [IC95 % : 1,22-3,77]), la prise d’une seule dose d’ivermectine versus deux doses (OR = 10,2 [IC95 % : 4,49-23,2]), la prise d’ivermectine pendant un repas plutôt qu’à jeun (OR = 4,31 [IC95 % : 1,28- 4,99]), l’absence de traitement de tout l’entourage (OR = 2,52 [IC95 % : 1,28-4,99]) ; l’absence de décontamination du linge/literie… (OR = 8,72 [IC95 % : 3,50- 21,8]) ; l’absence de documents écrits informatifs (OR = 5,18 [IC95 % : 2,57-10,4]) et l’utilisation de dermocorticoïdes après le traitement (OR = 2,05 [IC95 % : 1,11- 3,79]). Les facteurs restant significativement associés avec l’échec du traitement en analyse multivariée étaient la présence de symptôme > 1 mois avant le diagnostic, la présence d’autres cas dans l’entourage, l’absence de décontamination du linge/ literie, une seule prise d’ivermectine versus 2 prises (avec ou sans traitement local), un traitement local par benzoate de benzyle plutôt qu’un traitement par 2 doses d’ivermectine.
Au total, cette étude de cohorte de patients ambulatoire en « vraie vie » apporte des informations très importantes sur la prise en charge des patients ayant une gale.
Tout d’abord un traitement par benzoate de benzyle seul semble inférieur à un traitement par deux doses d’ivermectine ou l’association d’un traitement local et systémique. Par ailleurs, une seule prise d’ivermectine sans 2e prise 10-14 j plus tard est également un facteur de risque d’échec du traitement. Il semble être nécessaire d’insister sur une prise à jeun de l’ivermectine. Cette étude confirme que les mesures de décontamination du linge, de la literie… sont essentielles à la bonne prise en charge des patients. Ces mesures sont souvent contraignantes pour les patients et souvent mal comprises, difficiles à mettre en place et non remboursées. Enfin, les mesures d’information écrite sont un moyen simple et efficace d’améliorer la prise en charge des patients.
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