Publié le 17 mai 2016Lecture 3 min
Érythrodermie du nourrisson : un vrai défi de diagnostic étiologique
Z. DOUHI, S. GALLOUJ, M. MEZIANE, FZ. MERNISSI, CHU Hassan II, Fès, Maroc
L’érythrodermie, rare chez le nourrisson, est définie par la présence d’un érythème diffus, d’évolution prolongée, grave, touchant plus de 90 % de la surface corporelle et s’accompagnant d’emblée ou très rapidement d’une desquamation. Il s’agit d’une urgence dermatologique exigeant une prise en charge immédiate, tant sur le plan thérapeutique que sur le plan étiologique(1).
Nous présentons l’observation d’une érythrodermie observée chez un nourrisson, et discutons les difficultés du diagnostic étiologique et de prise en charge. Observation Il s’agit d’un nourrisson de 2 ans, issu d’un mariage non consanguin, avec bon développement psychomoteur et sans antécédents pathologiques notables qui consultait pour un érythème squameux intéressant le visage, le tronc et les membres. L’interrogatoire a révélé la notion des lésions érythémateuses et squameuses depuis l’âge de 2 mois, qui évoluaient par poussées/ rémissions. Les poussées étaient déclenchées par des infections à répétition, à point de départ oto-rhino-laryngé ou urinaire. L’évolution était marquée par la progression des lésions, depuis l’âge de un an, devenant confluentes et évoluant vers une érythrodermie squameuse très prurigineuse. L’examen clinique a montré un nourrisson en assez bon état général, sans retard staturo-pondéral, avec une érythrodermie sèche surmontée de lésions pustuleuses (figure 1). L’examen des phanères objectivait une paronychie, une onychodystrophie (figure 2) et une carapace du cuir chevelu. Figure 1. Érythrodermie sèche surmontée de lésions pustuleuses. Figure 2. Paronychie, pachyonychie et xantonychie. Des adénopathies superficielles infracentimétriques étaient palpées au niveau des aires cervicales, axillaires et inguinales, associées à une splénomégalie. La biopsie cutanée était en faveur d’un psoriasis. La patiente a été mise sous traitement topique à base de dermocorticoïde avec amélioration, mais la dermatose a récidivé à plusieurs reprises lors de la dégression du traitement et des épisodes infectieux. Elle a ensuite été traitée par acitrétine (Soriatane®) à la dose de 0,5 mg/kg/j avec une bonne évolution. Discussion Les érythrodermies chez le nourrisson sont rares et leur étiologie est délicate à déterminer, en raison de la faible spécificité des signes cliniques ou biologiques(1). On retrouve, chez le nourrisson, presque toutes les étiologies des érythrodermies de l’adulte, mais elles peuvent également entrer dans le cadre d’un déficit immunitaire, surtout si elles ont débuté précocement, d’une ichtyose, d’une histiocytose langerhansienne ou d’une dermatite atopique(2). Chez notre patiente, le diagnostic de psoriasis érythrodermique a été retenu étant donné l’aspect des lésions, l’évolution chronique par poussée/rémission, la notion de poussée déclenchée par des épisodes infectieux, l’histologie et l’amélioration sous traitement. Les érythrodermies psoriasiques acquises peuvent être secondaires à l’extension d’un psoriasis vulgaire ou pustuleux. Le psoriasis en plaques est la forme la plus fréquente avant 12 ans. Cependant, les lésions initiales sont souvent méconnues, car souvent frustes ou d’aspect trompeur, comme tel était le cas ici(3). La prise en charge de l’érythrodermie doit être immédiate, à la fois symptomatique et étiologique, compte tenu du risque de complications graves hydro-électrolytiques et infectieuses(4).
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